Le parcours de Valeria Moriconi est bien curieux car cette grande théâtreuse férue de classiques et grande prêtresse de Goldoni connut un lancement tel que n’en connaîtra pas Brigitte Bardot pour « Et Dieu Créa la Femme ». En Septembre 1954, des journalistes flanqués d’un très sérieux huissier de justice vont comptabiliser les hommes qui se retourneront sur le passage de Valeria dans les rues de Rome en une heure de promenade. Tableau de chasse exemplaire: 400 spécimens de curieux comptabilisés! L’idée peut paraître curieuse voire oiseuse mais la belle Valeria, jolie sauvageonne aux longs cheveux flottant librement sur les épaules avait été « découverte » par Alberto Lattuada qui l’avait « essayée » dans un sketch « Les Italiens se retournent ». Ceci expliquant cela.
La légende voudrait qu’Alberto Lattuada ait rencontré par hasard la jeune Valeria dans un restaurant romain. de son propre aveu, Lattuada aurait eu l’idée de son sketch en découvrant l’effet que provoquait Valeria sur la gent masculine romaine.
Valeria Abbruzzetti vint au monde le 15 Novembre 1931 à Jesi, une petite ville près d’Ancône.
Lorsqu’elle fait à Rome la rencontre de Lattuada elle a déjà 22 ans même si elle joue les sauvageonnes de 17 et est déjà divorcée du peintre Aldo Moriconi dont elle a gardé le patronyme. Lattuada distribue ensuite sa découverte dans « La Pensionnaire » où, pour la première fois Marine Carol joue les mamans à l’écran. Un court rôle, certes, mais en bikini, années 50 obligent! Ce lancement de starlette affriolante à la Marisa Allasio est comme je l’ai dit en préambule fort surprenant en regard de la carrière qui va suivre. Après avoir croisé Martine Carol elle croisera Hedy Lamarr en personne et alignera de nombreux tournages. Mais ses visées sont bien différente de ce que le cinéma fait, ou veut faire, d’elle.
Valeria se fiche bien de savoir si les hommes se retournent ou non sur son passage. Ce qu’elle veut, ce n’est pas être Marilyn, ce n’est pas être Bardot et encore moins Martine Carol, ce qu’elle veut c’est sentir la poussière des coulisses et entendre le frôlement des lourds rideaux rouges qui s’ouvrent en dévoilant la scène lorsque les lumières se baissent, ce qu’elle veut c’est faire du théâtre.
Elle connaît ses premiers triomphes sur scène dès 1957 et elle réussira la gageure de faire oublier la pin-up de cinéma pour la tragédienne que les plus grandes scènes vont bientôt s’arracher.
Telle Madeleine Renaud, elle va fonder sa propre compagnie avec son compagnon l’acteur Mori en 1961.Et si elle reste toute la décennie encore très active au cinéma, le septième art est désormais inféodé à son programme de comédienne de théâtre. Il n’est pas de Lattuada, de Visconti ou de Fellini qui puisse lui faire renoncer à jouer « La Dame de chez Maxim’s ».
Tous les comédiens qui ont le bonheur de pouvoir jongler avec ces deux disciplines très différentes que sont le théâtre et le cinéma savent que rien n’est plus grisant que de jouer face au public et que rien ne paie mieux que le cinéma.
Valeria est de celles qui pratiquent l’un sans délaisser l’autre. Mais malgré tout sa carrière filmée pâti de sa passion théâtrale. Valeria n’accepte pas les tournages demandant de longues préparations, de longues semaines de tournages et moins encore s’ils nécessitent un exil loin des scènes italiennes. Et puis, avec les années 70, le cinéma italien s’égare dans la gaudriole trouffionne, Valeria le délaisse de plus en plus et avec d’autant moins de regrets qu’elle s’est fait une excellente réputation d’actrice de télévision.
En 1979, Valeria Moriconi ralentit ses activités. Perdue pour le cinéma on la voit à peine à la télévision. Elle reste de plus en plus chez elle, dans la maison qu’elle s’est achetée dans le centre historique de sa ville natale. Peu de déclarations à la presse même si elle ne résiste pas à l’appel de la Cléopâtre de Shakespeare!
On ne la reverra, fort brièvement il est vrai au cinéma qu’en 1993, près de 15 ans après son dernier film. On la crut revenue pour une nouvelle phase de sa carrière maintenant qu’elle avait abordé la soixantaine somptueuse mais on ne la retrouvera que pour un baroud d’honneur en 2002.
Valeria crée en 2003 dans sa ville natale son centre d’études et d’activités théâtrales Valeria Moriconi et annonce que sera là son unique travail, renonçant à toutes ses autre activités.
Seuls ses proches savant que le cancer qui la dévore depuis des années ne lui laisse plus aucun espoir.
Elle s’éteint dans sa maison adorée au cœur de sa ville natale le 14 juin 2005.
Elle avait 74 ans.
Celine Colassin
QUE VOIR?
1953: Non è mai troppo tardi: Avec Iza Barzizza , Paolo Stoppa et Marcello Mastroianni
1954: La spiaggia: Avec Martine Carol
1954: Terza Liceo: Avec Paola Borboni et Christine Carère
1954: I cavalieri dell’illusione: Avec Hedy Lamarr
1954: Il barcaiolo di Amalfi: Avec Franca Marzi et Leda Gloria
1956: Totò lascia o raddoppia?: Avec Toto et Dorian Gray, Rossana Schiaffino et Bruce Cabot
1956: I giorni più belli: Avec Antonella Lualdi et Franco Interlinghi
1957: I dritti: Avec Corrado Pani
1957: Le belle dell’aria: Avec Giovanna Ralli et José Suarez
1959: Il terrore dell’Oklahoma: Avec Delia Scala at Maurizio Arena
1959: Le cameriere:Avec Giovanna Ralli et Ugo Tognazzi
1959: Lui, lei e il nonno: Avec Yvonne Furneaux et Walter Chiari
1961: Un giorno da Leoni: Avec Carla Gravina et Renato Salvatori
1962: Ultimatum alla vita: Avec Franca Bettoïa
1965: Le soldatesse: Avec Anna Karina, Marie Laforêt et Léa Massari
1976: Per amore di Cesarina: Avec Walter Chiari
1976: Quelle strane occasioni: Avec Paolo Villaggio
1977: Che notte quella notte!: Avec Turi Ferro
1979: Improvviso: Avec Elvira Agave
1993: La fine è nota: Avec Valerie Kaprisky et Mariangela Melato
2002: La forza del passato: Avec Bruno Ganz