La gracieuse Sophie Stewart qui naquit en Ecosse, le 5 Mars 1908 est malheureusement bien oubliée aujourd’hui. Et comble d’injustice, on se souvient essentiellement de l’épisode le moins glorieux de sa carrière pourtant riche en hauts faits et jalonnée de succès personnels au théâtre, au cinéma et à la télévision. La charmante Sophie qui ne se soucia jamais d’informer les journalistes sur les aléas et péripéties de sa vie privée était déjà célèbre sur les scènes londoniennes lorsqu’elle fit, à 27 ans, ses débuts au cinéma. N’ayant jamais eu vocation de starlette ni l’envie de jouer les « girls » pour obtenir un rôle, elle attendit qu’on lui propose un matériel à défendre digne de son talent et conforme à sa personnalité. Elle ne fut donc jamais, telle Barbara Stanwyck la « troisième flamme à droite sur un chandelier humain » et débuta au cinéma en 1935 dans un premier rôle. Elle avait bien fait d’attendre, elle y fut magnifique et le film connut un succès populaire énorme! « Maria Martin ou le Meurtre de la Grange Rouge » fit d’elle une vedette de cinéma en un film!
Lancée, Sophie Stewart se mit à tourner avec régularité et bonheur des films qui finirent d’asseoir sa réputation d’actrice de qualité et appréciée du public. Elle mena au succès plusieurs films par an jusqu’à ce qu’arrive d’Hollywood la proposition fabuleuse qui aurait pu faire d’elle une star de premier plan. On ne veut qu’elle en Californie pour interpréter à l’écran la nurse anglaise fusillée en Belgique en 1915 et qui donnera plus tard son nom à la clinique bruxelloise où naîtra Audrey Hepburn: la clinique Edith Cavell.
Il y a là, dans la vie de l’héroïque nurse, matière à bien des mélodrames avec des traitres, des espions, des soldats, des larmes et beaucoup de pansements. Sophie accepta cette offre si tentante, gagna Hollywood sans trop de fanfare car ce n’était pas dans ses manières. Mais la belle aventure allait tourner court, car si Sophie Stewart est bien dans le film, l’héroïque infirmière sera finalement incarnée par Anna Neagle et Sophie dégringole dans les tréfonds du générique pour un rôle d’un intérêt plutôt moyen! Dès le film terminé, lequel n’aurait aucun succès puisque Betty Grable n’y était pas, Sophie qui en avait déjà assez des manières hollywoodiennes honora son contrat puisqu’elle y était tenue légalement et dû se contenter de rôles médiocres dans des films qui ne risquaient pas de concurrencer « Autant en Emporte le Vent ».
La guerre finira d’abîmer cette carrière si magnifiquement commencée. Lorsqu’elle regagnera sa chère Angleterre, elle retrouvera un pays meurtri, une capitale détruite et le souvenir de ses anciens succès bien effacés des mémoires. Sophie était partie depuis si longtemps, et rien dans les films qui arriveraient d’Hollywood sur les écrans anglais libérées ne pouvant permettre de redorer un blason bien pâli. La carrière de Sophie Stewart était virtuellement terminée même si elle resta active jusqu’à la fin des années 60, regardant avec un désintérêt complet sa taille s’épaissir car ce genre de détails n’est que de peu d’importance sur les planches et dans ses préoccupations.
Elle s’éteindra dans sa chère Angleterre, le 6 Juin 1977 dans une Londres reconstruite sur l’oubli des horreurs de la guerre et de la carrière de Sophie Stewart.
Celine Colassin.
QUE VOIR?
1935: Marta Marten or the Murder in the Red Barn: Avec Tod Slaughter
1935: City of Nonsense Beautiful: Avec Emlyn Williams
1937: Under the Red Robe: Avec Conrad Nagel et Annabella
1937: Return of the Scarlet Pimpernel: Avec Margaretha Scott et James Mason
1939: Nurse Edith Cavell: Avec Anna Neagle et George Sanders
1940: My Son, My Son: Avec Madeleine Carroll, Brian Aherne et Laraine Day.
1953: Made in Heaven: Avec Petula Clark
1954: Devil Girl from Mars: Avec Patricia Laffan, Adrienne Corri, Hazel Court