Signe Hasso fait partie du cheptel de suédoises fabuleuses que fit venir Hollywood pour éblouir le public de leur beauté et charmer les critiques de leur talent. Il y eut bien entendu Greta Garbo, qui devint d’ailleurs une amie intime de Signe, leurs destins étaient par trop semblables. Ingrid Bergman, Marta Toren, Viveca Lindfors et…Signe Hasso avant Ann Margret.
Cette jolie fleur des neiges vient au monde dans une famille pauvre à Stockholm, le 15 Août 1910 et non 1915 comme on le clame si souvent, et ce qui la ferait naître 14 jours seulement avant Ingrid Bergman. Signe est pour l’état civil suédois Signe Eleonora Cecilia Larsson. Les parents de Signe ont fait un mariage d’amour et ils auront encore deux autres enfants après Signe qui est leur fille aînée. Mais hélas, le père meurt alors que Signe n’a que quatre ans. Le destin bascule, la misère frappe à la porte, et la jeune veuve, artiste peintre est bien peu faite pour affronter l’adversité. Elle vendra des gaufres pour faire vivre sa famille et continuera à peindre la nuit dans l’espoir de vendre quelques toiles et arrondir les fins de mois.
La petite Signe, très choquée par la mort brutale de son père décidera très tôt d’être médecin pour à la fois bien gagner sa vie et pouvoir affronter la maladie en face et protéger les siens. Mais son destin va très vite en décider autrement. Les choses vont prendre une tournure très inattendue. Une de ses amies a un metteur en scène de théâtre dans sa famille, ce qui la nimbe d’un prestige sans égal et quelque peu scandaleux. Or ce brave homme a un souci d’envergure : la gamine qui joue dans sa pièce est malade un soir sur deux.
Cette petite fille, amie de Signe n’osa pas proposer ses services de peur d’être immolée par sa famille sur scène, mais proposa ceux de Signe dont elle connaissait la grande précarité familiale. Et comme de bien entendu, celle-ci se rua sur cette occasion de gagner quelques couronnes.
Elle débutait donc à 12 ans sur scène sous son véritable patronyme de Signe Larsson. La nouvelle venue connaîtra le succès, et lorsqu’elle aura l’âge d’entrer à l’académie royale d’art dramatique, elle sera déjà une actrice chevronnée. En 1933 elle débutait au cinéma, en 1934 elle glanait plusieurs récompenses théâtrales, en 1937 elle était lauréate des Oscars suédois pour son rôle dans « Carrière ».
Bref, la petite « dépanne » enfantine avait fait naître une nouvelle star des scènes et des écrans suédois.
En 1933, elle avait épousé le réalisateur Harry Hasso, et l’année suivante leur fils Henry était né. Mariée, Signe adopta son nouveau patronyme légal et devint Signe Hasso pour l’état civil et pour le public.
En 1939, sa gloire nationale est telle qu’elle est venue aux oreilles des studios hollywoodiens et que la RKO lui propose un contrat.
Signe Hasso va alors vivre une des parties les plus insensées de sa destinée. Inquiète des bruits de bottes fachistes comme tous les européens, Signe accepte les propositions américaines. Essentiellement pour mettre un océan entre l’éventualité d’une guerre et son petit garçon. Mais elle accepte à la condition sine qua non de pouvoir terminer tous ses engagements suédois. Partir, oui. Se défiler, non!
Le soir de la première de sa nouvelle pièce à Stockholm, les Allemands envahissent Oslo en faisant tonitruer leur hymne national! C’est la guerre, Signe Hasso est coincée. Les théâtres ferment, les prix flambent, et même pour une actrice célèbre il devient impossible de s’offrir un billet pour l’Amérique.
Signe Hasso réussira pourtant l’impossible. Elle gagnera Hollywood avec son petit garçon en passant par le Japon et la Sibérie, un voyage insensé, interminable, et…pour rien si ce n’est la sécurité. La RKO, depuis le temps avait oublié cette Suédoise et son contrat et n’avait strictement plus aucun rôle à lui confier!
L’actrice se retrouve donc complètement oisive, ce qui n’est guère en accord avec sa nature. Ayant appris tout à fait fortuitement qu’une actrice laissait tomber un rôle à Broadway, celui que tiendra plus tard Marlène Dietrich au cinéma dans « Les Anneaux d’Or », elle traversa le pays, proposa ses services et fut engagée. La pièce n’était pas très bonne, elle ne tint que deux semaines, mais ce fut suffisant pour que Signe soit remarquée par un scout de la…MGM!
Signe Hasso pouvait enfin débuter à Hollywood, elle avait signé son premier contrat en 1939, nous étions en 1942! Son premier rôle fut presque entièrement liquidé au montage, car elle éclipsait la vedette du film Laraine Day ! On lui fit ensuite interpréter des Françaises puis une Hollandaise, puis une Allemande, on l’avait prêtée à Century Fox, on la prêtait à Paramount. Bref, et en un mot comme en cent, si on était unanime à Hollywood pour la dire excellente actrice, on ne savait trop que faire d’elle.
Ce qui ne l’empêchera pas de participer à des films de prestige et de donner la réplique à Spencer Tracy, Ronald Colman, Jean-Pierre Aumont ou…Bob Hope! Elle tournera également pour Lubitsch, Hataway, Sirk ou Cukor.
Signe Hasso ne s’ennuyait pas à Hollywood, elle y avait de nombreux amis, elle était respectée, tournait de bons films. Divorcée, elle vivait dans une très belle maison avec son petit garçon. Le jeune Henri avait montré très tôt de grandes dispositions pour la peinture et son travail mouillait les yeux de sa jolie maman, qui dans le trait de son fils retrouvait celui de sa propre maman. Harry Hasso, quant à lui, allait se remarier avec…Viveca Lindfors!
La carrière de Signe Hasso ira ralentissant, sans doute parce que l’éclectisme de ses rôles au cinéma n’avait pas permis au public de se faire une idée bien précise de qui elle était vraiment. Elle était une actrice sans image et seul Cary Grant s’avouait être un fan absolu et invétéré. Mais la belle Suédoise n’attendait pas le cinéma pour vivre. Elle brilla souvent à Broadway, s’engouffra à la télévision et se toqua pour le travail « en direct » qui la passionnait plus que tout.
En 1955, c’est une femme heureuse qui se remariait avec un certain monsieur William Langford.
Deux ans plus tard, hélas, le destin allait la frapper en plein cœur dans ce qu’elle avait de plus précieux et anéantir à jamais sa formidable joie de vivre. Son fils Henri Hasso se tuait en voiture à l’âge de 23 ans.
Dès lors Signe Hasso se partagera entre les scènes suédoises et Broadwayriennes et petit à petit se consacrera à l’écriture, qu’il s’agisse de livres pour enfants, de romans ou de paroles de chansons. Elle même chantait d’ailleurs d’une très belle voix grave.
Le 10 Juin 2002, Signe Hasso rendait l’âme. Elle avait 92 ans et mourait de complications respiratoires, elle luttait depuis des années avec acharnement contre le cancer du poumon. Veillée par son conjoint William Langford, elle s’éteignait à Hollywood, ce Hollywood qu’elle avait, somme toute, tant aimé.
Celine Colassin.
QUE VOIR?
1939:Emelie Högqvist: Avec Georg Rydeberg
1940: Bastard: Avec Georg Lokkeberg
1941: Den Ljusnande Framtid: Avec Ernst Eklund
1943: Le Ciel peut Attendre: Avec Don Ameche et Gene Tierney
1944: The Story of Dr Wassel: Avec Gary Cooper et Laraine Day
1945: The House of the 92nd Street: Avec Lloyd Nolan
1947: A Double Life: Avec Ronald Colman et Shelley Winters
1950: Outside the Wall: Avec Marilyn Maxwell et Richard Basehart
1954: Die Sonne von St. Moritz : Avec Karlheinz Böhm
1966: Picture Mommy Dead: Avec Zas-Zsa Gabor, Martha Hyer et Don Ameche
1973: A Reflexion of Fear: Avec Sally Kellerman, Robert Shaw et Mary Ure
1975: The Black Bird: Avec Stephane Audran et Georges Segal.
1977: I Never Promise You a Roses Garden: Avec Bibi Anderson et Sylvia Sydney
2000: One Hell of a Guy: Avec Alexandra Powers, Rob Lowe et Michael York