Rosemary DeCamp est une de ces actrices qui se spécialisèrent dans les rôles de « femmes bien ». Bonnes épouses et bonnes mères, pleines de principes, de sollicitude et de recettes de cuisine. N’était-elle pas dans la vie l’épouse d’un juge? Un mariage solide comme un roc, une union de 57 ans couronnée de quatre enfants, quatre filles.
Mais commençons par le début. Les parents de Rosemary ont quitté leur Iowa natal au profit de l’Arizona qui dut leur sembler plus prometteur. C’est là, à Prescott que William et Margaret mettront au monde leur petite Rosemary le 14 Novembre 1910. Bien des années plus tard, 14 ans, Rosemary aura un petit frère: Jerry. C’est en 1937 que Rosemary fait parler d’elle pour la première fois. Avec sa voix délicieuse et son élégante distinction elle a obtenu un rôle dans un feuilleton radiophonique. Et coup de chance, le feuilleton va connaître une longévité fabuleuse. Dans le rôle de Judy Price, Rosemary est entrée dans tous les foyers américains. En 1937, les stars de la radio sont des stars immenses, puisque la radio s’écoute dans les confins les plus reculés où il n’y a pas de cinémas et encore moins de théâtre.
Et comme il est d’usage à l’époque, Hollywood s’empresse de détourner à son profit ces vedettes déjà immensément populaires et sachant de toute évidence dire un texte! Nul doute que le public va se ruer dans les cinéma pour les voir. C’est la Warner qui va rafler la mise avec Rosemary. Mais à son arrivée, quelle ne fut pas la surprise de voir « en vrai » la gentille infirmière Judy Price des ondes! La créature était d’une beauté fabuleuse que l’on s’empressa de déguiser en « vamp ».
Erreur de casting ca rien n’était plus éloigné de la véritable nature de Rosemary que ces poules de western godillant entre deux fusillades et ces créatures ténébreuses assassinat sans vergogne pour d’obscurs motifs et sans même s’écailler le vernis à ongles. Alors même si ce n’était pas son emploi, Rosemary fit contre mauvaise fortune bon cœur se disant que peut-être, une foule de starlettes se seraient vendues pour un de ces rôles qu’on lui infligeait. Et puis le studio a déjà une belle brochette d’actrices « difficiles » en commençant par miss Bette Davis. Rosemary n’allait pas ajouter son nom à la liste des belliqueuses maison! Son genre était définitivement ailleurs et puis, ses contrats à la radio couraient toujours, tout celà n’avait après tout pas beaucoup d’importance.
C’est en 1941 qu’elle convolera avec le juge de son coeur, John Ashton Shidler. Le seul homme de sa vie qui la laissera veuve en…1998. Rien dans sa vie personnelle ou conjugale ne méritera même une ligne dans la presse people. Elle se conduit définitivement « trop bien pour Hollywood ».
A ceci près qu’elle est sans conteste possible l’actrice qui eut le contact le plus fracassant de l’histoire avec Howard Hugues! Un beau matin, Rosemary et son juge seront réveillés par un fracas assourdissants. Hébétés au beau milieu de leur lit et d’une scène d’apocalypse, leur chambre à disparu comme tout l’étage de leur maison, ils sont littéralement posés en plein ciel entre une aile d’avion et un pan de toit qu’ils identifieront comme étant non pas le leur mais celui du voisin. Ce cher Howard avait essayé un de ses chers avions qui dut être par trop récalcitrant car il s’écrasa dans leur quartier faisant de leur maison et de celle de leur voisin une sorte de puzzle 3D agrémenté de quelques pièces d’aéronautique. Effarés mais indemnes, ils ne choisirent pas de déménager, ils déménagèrent puisque leur maison n’existait plus. L’avion farceur sera recréé pour le film « Aviator » en 2004.
Avec les années 50, Rosemary sera enfin débarrassée de tout le fourbi glamour girl et se fera une place honorable dans tous les rôles de ménagère américaines idéalisées. Son image collant parfaitement avec l’emploi elle sera longtemps l’égérie à succès d’une marque de lessive. Ce qui lui fera dire « pourquoi aurais-je honte de vendre de la lessive? Je suis bien meilleure là dedans que dans mes premiers films.
Et puis avec les années 50, c’est désormais à la télévision qu’elle se produit dans une flopée de programmes où ses bonnes manières d’américaine middle class font merveille. Lorsqu’on lui proposera des rôles un peu risqués de péripatéticiennes sur le retour, de nymphomanes ou d’alcooliques, ces rôles sur lesquels ses anciennes collègues Warner, Bette Davis et Eleanor Parker se seraient ruées, Rosemary refusera d’un « Messieurs, à quoi pensez-vous? Pas après avoir été la mère de Doris Day et de Ronald Reagan! » Rosemary s’éteindra dans sa 90 ème année, emportée par une pneumonie le 20 février 2001, entourée des siens dans sa propriété de Newport Beach en Californie. Elle n’avait jamais pris sa retraite, tournant jusqu’à ce que son âge et sa santé ne lui garantissent plus d’être en mesure de terminer ce qu’elle commençait. C’était en 1989, Rosemary donnait son baroud d’honneur dans un épisode d’Arabesque.
Celine Colassin
Que Voir?
1941: Cheers for miss Bishop: Avec Martha Scott
1941: Hold Back the Dawn: Avec Olivia de Havilland et Paulette Goddard
1942: Commandos Strike at Dawn: Avec Anna Lee et Paul Muni
1942: Jungle Book: Avec Sabu
1942: Eyes in the Night: Avec Ann Harding et Donna Reed
1945: Rhapsody in Blue: Avec Alexis Smith et Joan Leslie
1945: Weekend at the Waldorf: Avec Ginger Rogers et Lana Turner
1945: Too Young to know: Avec Joan Leslie et Dolorès Moran
1945: Danger Signal: Avec Faye Emerson et Zachary Scott
1946: From This Day Forward: Avec Joan Fontaine et Mark Stevens
1946: Two Guys from Milwaukee: Avec Joan Leslie, Dennis Morgan et Jack Carson
1947: Nora Prentiss: Avec Ann Sheridan
1949: Night Unto Night: Avec Viveca Lindfors et Ronald Reagan
1949: The Life of Riley: Avec William Bendix
1951: On Moonlight Bay: Avec Doris Day
1951: Night into Morning: Avec Nancy Reagan et Ray Milland
1953: So this is Love: Avec Kathryn Grayson
1955: Many Rivers to Cross: Avec Eleanor Parker et Robert Taylor
1960: 13 Ghost: Avec Jo Morrow
1981: Saturday the 14th: Avec Paula Prentiss