mary castle

Au début des années 50, lorsqu’une fois du plus un journaliste aborda Mary Castle en parlant d’emblée de sa ressemblance avec Rita Hayworth, déjà désabusée elle répondit: « Oh quelle importance? J’ai un ami qui ressemble comme deux gouttes d’eau à Dan Dailey, j’ai un agent qui ressemble à Mario Lanza et vous même, personne ne vous a encore dit que vous ressemblez à Van Johnson? Alors qu’importe, tout le monde ressemble plus ou moins à quelqu’un, parlons d’autre chose... »

Oui mais voilà…De quoi?

C’est ce que la Columbia avait fait d’elle une nouvelle Rita Hayworth, mieux qu’un sosie, une véritable décalcomanie!   Rita était partie en Europe épouser Ali Khan, Harry Cohn avait décrété qu’il avait au moins dix autre Rita Hayworth sous la main, encore plus belles, encore meilleures actrices et qui ne demandaient qu’à le prouver au monde! Quant à Rita l’ingrate…Don débarras! Quoique…

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Mary Ann Noblett vient au monde le 22 janvier 1931 au Texas. Ses parents Erby et Myrtle ont déjà un fils, Erby jr.

Dès sa petite enfance, son grand frère, ultra sportif et futur policier (un comble quand on sait ce qui va suivre) va lui faire découvrir et aimer le sport! A quatre ans elle courait déjà « aussi vite qu’une fusée de 14 juillet ». A neuf ans, cette petite sportive et mignonne comme un cœur manque de passer de vie à trépas, frappée par une pneumonie. Très affaiblie, la petite fille doit renoncer au sport. Pour la désennuyer sa maman l’incite à étudier l’art dramatique Elle aurait préféré le chant ou la danse mais son souffle est désormais trop court.

Finalement la famille devra quitter le Texas et s’installer à Long Beach en Californie au climat plus salutaire pour la jeune Mary.  C’est là que son frère deviendra officier de police. Malgré son apprentissage en art dramatique, Mary n’a pas senti naître la vocation artistique. Elle préfère s’adonner à l’équitation, un sport qu’elle peut se permettre physiquement; et accessoirement à la conquête des garçons.

En 1946, elle a 15 ans et met au monde une petite fille, Judy. Mary n’est pas mariée, l’enfant est déclarée à l’étant civil comme Judy Fergusson. Mary est donc une très jeune maman se fichant du cinéma comme d’une guigne. Elle est devenue l’égérie d’une marque de maillots, pose deux ou trois fois l’an pour des campagnes de presse, participe à quelques concours d’été, bref elle se laisse vivre sans grande ambition. Disons qu’elle profite d’être jolie puisqu’en Californie c’est un métier.

Pourtant, sans qu’elle ne s’en doute le moins du monde, son destin va se jouer à Hollywood.

Rita Hayworth est la principale money maker du studio Columbia. C’est à un point tel que l’on appelle désormais la Columbia le studio Rita Hayworth. Les relations entre la star et le patron du studio Harry Cohn sont désastreuses, mais lorsque les millions parlent, les rancœurs se taisent au moins le temps d’empocher.

Et puis soudain, en 1949, Rita abandonne tout! Elle gagne l’Europe pour y épouser Ali Kahn, l’homme le plus riche du monde dit-on et accessoirement devenir princesse. Cohn a hurlé, tempêté, menacé, supplié, rien à faire, Rita Hayworth n’a rien voulu entendre et a claqué la porte sans un regard et encore moins de regrets! Cohn ivre de colère jure de trouver une nouvelle Rita Hayworth, plus belle plus sexy plus talentueuse et surtout plus docile. Tous les talents scouts sont sur les dents à la recherche de la merveille. Cohn a prétendu avoir sous contrat au moins dix starlettes bien plus belle que Rita. C’est faux. Alors en montrer une c’est une urgence absolue!

C’est ainsi qu’il jette son dévolu sur Mary lorsqu’il tombe sur une photo d’elle en maillot. Cohn fait convoquer la jeune Mary exactement comme on décide d’adopter un chien dans un chenil.

En fait dès qu’Harry Cohn s’est rendu compte qu’il ne ferait pas changer Rita d’avis il s’est jeté à la chasse à la remplaçante, espérant la lui fiche sous le nez dans l’espoir d’attiser sa jalousie! Il est fort probable qu’il ait « montré » Mary Castle à Rita. Mais l’homme n’a jamais été particulièrement finaud, Si cette « présentation » a bien eu lieu, le seul résultat aura été pour Rita de voir que le vieil ours mal embouché d’Harry Cohn s’était trouvé un nouvel os à ronger sous forme d’une nouvelle starlette à exploiter comme elle-même l’avait été durant trop d’année.

Mary Castle fut selon la tradition Columbia prise sous contrat, et jetée dans une kyrielle de séries B comme c’était la tradition maison et toujours comme Rita l’avait été. Accepta-elle ce que Rita avait obstinément refusé ? A savoir se faire culbuter sur le divan de pluche rouge du bureau de Cohn pour la galipette de bienvenue, je l’ignore. Mais au vu de la manière dont Cohn la traitera par la suite, à savoir plus mal encore de Rita, je présume que non!

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Mary va donc promener sa beauté dans quelques films, à peine figurante, beaucoup poser pour des photos de mode ou de pin-up. Elle sera élue « miss Cactus » ce qui lui permettra de poser à côté d’un faux cactus et autres fariboles du genre. Pourtant la belle Mary semble mériter mieux qu’un emploi d’objet publicitaire, succédané pour Rita Hayworth envolée!

Elle va suivre six mois de très sérieux cours d’art dramatique pour parfaire son bagage et va même présenter à Harry Cohn une jeune actrice de sa découverte : Susan Ball qui connaîtra elle aussi, hélas, un destin tragique.

Cohn la fait peu travailler, elle a même assez de loisirs pour se mettre à la sculpture et faire parler d’elle non pas grâce à ses rares films ou sa ressemblance avec Rita mais pour sculpter des nus d’elle même! Lesquels dit-on sont fort réussis et très intéressants.

Et puis, en 1952, tout explose, cette histoire mal engagée du départ va tourner au calvaire! Cohn a décidé que Mary Castle était prête à être lancée! A force de publier ses photos de pin-up elle est la « Dream girl » numéro un des soldats américains en Corée! Elle avait d’ailleurs joué les chœurs derrière un Bing Crosby en tournée aux armées dans « Just for you ». Alors Cohn s’apprête à frapper un grand coup! Un film noir où elle chantera et dansera. Un film calqué sur « Gilda » qu avait fait la gloire de Rita Hayworth et avec son partenaire de prédilection: Glenn Ford.

Tout est prêt pour faire de Mary Castle la nouvelle superstar Columbia.

Elle a déjà fait les essayages et répète les chorégraphies lorsque la foudre s’abat sur Hollywood!

Rita divorce, Rita revient! Mieux encore, elle accepte de revenir chez Columbia où elle est chez elle. Cohn en profite pour revoir son salaire nettement à la baisse. La Columbia avait accueillit Mary comme un don du ciel et s’apprêtait à faire d’elle sinon la reine d’Hollywood au moins la reine du studio. Et puis les noces princières capotant, Rita rentrant au bercail. La Columbia mit les bouchées doubles pour que le film que tournait Mary se termine dans les meilleurs délais et la congédia comme une malpropre…ou presque. Universal l’attendait avec à la clé un rôle dans un western d’Audie Murphy. Mary se déclara ravie et se dépêcha d’au moins changer de coiffure!

Rita portera ses robes apprendra ses danses, jouera son rôle et tant pis si c’est très indigne de son prestige. Cohn ne peut en aucun cas se permettre de miser encore le moindre cent sur une concurrente de sa star qui lui est revenue!  »Affair in Trinidad » sortira avec le slogan « She’s Back! » Rita sortira en larmes de la preview tellement le film est raté et indigne d’elle. Un scénario biscornu, des danses vulgaires une photographie noir et blanc peu reluisante. D’ailleurs à Hollywood on comprend mal. Cohn n’aurait pas agi autrement s’il avait voulu la détruire mais il lui fait déjà tourner son film suivant « Salomé » où il dépense sans compter pour remettre Rita sur le trône de reine d’Hollywood!

Personne ne se doute que Rita a été parachutée dans le film d’une autre. Le film de Mary Castle pour qui « Affair in Trinidad » était bien assez prestigieux comme ca!

Mary de son côté tournera le nombre des films sans envergure quand il n’y a « personne d’autre à mettre dedans ». Des westerns de série B pour la plupart d’entre eux! Un contrat signé en 1949 avec Columbia récupéré en 52 par Universal et qui traînera la pauvre Mary jusqu’en 1960! Il était libellé en nombre de films et non en temps.

Ce traitement infligé par Hollywood à une jeune  femme qui n’avait somme toute rien demandé ne va pas lui être salutaire! Couronnée comme « l’une des plus belles femmes du cinéma mondial » richement payée bien qu’elle ne tourne pas ou peu, Mary Castle devenue « celle qui se prenait pour Rita Hayworth »

Elle va s’étourdir dans la ronde des Nights-clubs, des fiancés aussi  décoratifs qu’interchangeables et des cocktails bien dosés. On la verra au bras d’Oleg Cassini, de Ricardo Montalban et bien sûr d’une jolie petite collection de milliardaires. Le public, déjà, ne s’intéresse plus à ce qui peut bien arriver à cette « fausse » Rita Hayworth. A peine s’émeut-on lorsque sa petite fille tombe gravement malade en 1955.

En 1957, elle fait, espère-on une fin en épousant un riche texan « roi du pétrole » William France Minchen. Un « beau gosse » à peine d’un an plus âgé qu’elle, qu’elle essaiera même d’imposer à ses côtés au cinéma sous le pseudonyme de William Grant. Un comble pour une actrice qui n’arrivait pas à s’imposer elle-même! Dix mois plus tard la belle entente du couple vole en éclats! Ils sont arrêtés par la police alors qu’au milieu de la nuit ils se bagarrent dans leur voiture garée sur le bas côté de la route, la petite Judy en larmes sur la banquette arrière.

Si monsieur accepta de se faire escorter aimablement jusqu’à leur somptueuse villa de Beverly Hills, il n’en alla pas de même avec madame qui vociférant  comme une hyène affamée s’en prit aux gens de la maréchaussée qui n’eurent d’autres ressources que de la fiche en tôle et faire photographier leurs morsures par une presse ravie de l’aubaine mais quand même un tantinet sidérée! Un comble murmurait-on sur le ton de la confidence risquée ou de la plaisanterie finaude pour la soeur d’un brillant officier de police dont elle est la marraine de brigade!

En 1958 le couple est en pleine procédure de divorce, une de celles dont les journaux se régalent. Son studio lui a permis de faire de la télévision, espérant sans doute qu’elle en profiterait pour filer à New-York y mener son tapage mais aujourd’hui, pas de chance on tourne aussi pour la TV à Hollywood!

C’est comme « actrice de télévision » qu’elle est citée à l’audience et lorsque son mari est condamné à payer 350$ par semaine pour son entretient elle hurle « Il faut condamner sa mère à payer! Cet empaffé n’a jamais travaillé un jour de sa vie! Il n’a pas un radis à lui! C’est sa mère qui paie tout sans elle il crèverait de faim! » La mère s’étant ébouriffée estimant qu’elle n’avait pas à payer pour « cette fille » le juge lui rétorqua qu’à son avis elle ne devrait pas avoir à payer pour un fils de cet âge non plus!

Un journaliste profite du tumulte en salle d’audience pour demander  » Mary Castle, Vous n’en avez pas assez d’être comparée à Rita Hayworth? » elle lui répond avec la sympathie d’un lance flammes » Demandez donc à Rita Hayworth si elle n’en a pas marre d’être comparée à Mary Castle! »

En décembre 58 son ex belle-mère qui ne cessait de s’écrier « j’en mourrai » met ses menaces à exécution. Mary flanquée d’une armée d’avocats fait mettre la succession sous scellés, prétendant qu’elle n’ a jamais reçu ses 350 minables dollars mensuels de l’héritier!

l’année suivante elle est hospitalisée après avoir été retrouvée sans connaissance sur la plage de Malibu. « Sauvée in extremis par un barman » titre la presse.

A partir de l’automne 1959, Mary Castle passera son temps à faire des aller-retour en prison avec la régularité d’un métronome. Toujours pour les mêmes raisons: ivresse sur la voie publique, au volant, partout. Troubles de la circulation automobile, elle n’aime en effet rien tant que de régler la circulation, demi mue aux petites heures du matin au milieu des carrefours, se faire surprendre en situation compromettante avec des jeunes messieurs et bien entendu s’en prendre à ces messieurs les policiers qu’elle ne peut pas voir en peinture! Leurs uniformes ont sur elle l’effet d’une étoffe rouge sur un taureau aviné! Lassée elle-même de ses frasques elle tente de se pendre dans sa cellule en faisant un nœud coulant avec les manches de sa robe! Emmenée dans un état crépusculaire aux urgences,  revenue à elle, elle traitera les agents d’affabulateurs complets! A chaque arrestation, chaque altercation le montant de sa caution augmente et le juge un peu ému par tant de beauté qui la lâchait pour 100$ ne veut plus rien entendre en dessous de 4500!  C’est ce qu’elle appelle « des tentatives odieuses pour ruiner sa carrière! »

Un jour elle se défend « Vous n’aurez donc aucune pitié pour une femme désespérée engoncée dans une procédure de divorce horrible? » elle est divorcée depuis près de 2 ans!

En 1960 elle a reçu ses dernières propositions en TV et a enfin liquidé son contrat. Après le tournage d’un spot TV pour Cadillac et avoir battu le record de feux rouges brûlés de l’année 1959 elle quitte Hollywood pour la Nouvelle Orléans où elle épouse en toute discrétion un détective d’assurances : Wayne Cote.

En 1961, son mariage est annulé et elle professe comme hôtesse dans un restaurant d’hôtel à Hollywood.

En 1971, très oubliée elle se remarie une ultime fois toute aussi brève avec un certain Erwin Frezza et en divorce presque immédiatement.

Le 29 avril 1998 c’est elle qui décède du cancer du poumon. Elle n’avait que 67 ans et se battait depuis longtemps contre la maladie. Il lui restait un quart de poumon à sa fin.

Celine Colassin

mary castle

QUE VOIR?

1948: Mexican Hayride: Avec Virginia Grey, Abbott et Costello

1949: Always Leave Them Laughing: Avec Virginia Mayo et Ruth Roman

1949: The Threat: Avec Virginia Grey et Michael O’Shea

1950: The Tougher They Come: Avec Wayne Morris

1951: Prairie Roundup: Avec Charles Starrett

1952: Just for You: Avec Jane Wyman et Bing Crosby

1952: Eight Iron Men: Avec Dickie Moore et Lee Marvin

1953: Three Steps to the Gallows: Avec Scott Brady

1956: Yaqui Drums: Avec Rod Cameron

1956: Crashing Las Vegas: Avec Leo Gorcey

1957: The Last Stagecoach West: Avec Jim Davis et Lee van Cleef

1960: The Jailbreakers: Avec Robert Hutton

 

 

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