Maria Denis naît à Buenos Aires où ses parents Italiens sont installés, le 22 Novembre 1916. Elle est alors Maria Esther Belomonte pour l’état civil. Maria grandira sous le ciel d’Argentine jusqu’à ses 16 ans, lorsque ses parents choisissent de regagner leur mère patrie. La demoiselle qui découvre alors la terre de ses ancêtres est déjà une charmante créature aux rêves de gloire bien arrêtés dans une tête bien faite. Maria voudrait faire du cinéma.
Elle en fera, et même très vite. Débarquée en Italie en 1932, elle apparaît déjà aux écrans la même année dans un film dont Isa Pola est la vedette: « La Téléphoniste ». Oh, presque rien, à peine une figuration, mais n’est-ce pas un premier pas et n’est-ce pas ce qui compte?
En fait de premier pas, notre héroïne devenue « Maria Denis » va en faire de bien grands en bien peu de temps. Complètement inconnue en 1932, elle tourne trois films en 1933, cinq en 1934. Débutante à 16 ans elle est vedette à dix-huit! Maria a tout ce qu’il faut pour conquérir les cœurs italiens des années 30: Jolie comme un coeur, espiègle et délicieuse, elle a en plus d’excellentes manières qui rassurent le public de son temps qui s’entiche de « dames » à la mode hollywoodienne. Le règne des grandes divas mussoliniennes est avancé, Clara Calamai et Doris Duranti sévissent au bout du téléphone blanc sous leurs renards assortis et leurs bijoux. Maria Denis en prendra vite de la graine et sera bientôt une très allurale comédienne dans la foulée distinguée d’une Isa Miranda!
Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si dès ses débuts le public italien trouva qu’elle formait un couple très bien assorti avec un élégant débutant nommé Vittorio de Sica qui sera plusieurs fois son partenaire. Dans le privé, c’est avec un autre arbitre des élégances que Maria Denis va se lier d’amitié jusqu’à devenir inséparables: Le très mondain Luchino Visconti.
La guerre la surprend à la fois au sommet des affiches et dans une liaison sentimentale qui finira par peser très lourd avec Pietro Koch, chef de la police nazie à Rome. C’est durant cette période plus que troublée, en 1942, qu’elle va tourner son film le plus mémorable dans les bras de Louis Jourdan sous la direction de Marcel L’Herbier: « La Vie de Bohème ». Film qui sera à la fois la quintessence de sa carrière et l’annonce de son déclin. La paix revenue avec la défaite italienne, le pays règle ses comptes et tente de laver son honneur, Maria Denis est pointée du doigt vengeur et outragé de la justice d’un pays qui oublie bien plus vite sa dévotion idolâtre au Duce que les amours de ses actrices.
Maria Denis se défendra brillamment face à ses juges et ses détracteurs qui comme toujours tentent de laver leur honneur compromis dans l’humiliation faites aux femmes. Les Italiens n’ont-ils pas montré leur courage en tuant sauvagement la maîtresse de Mussolini comme si elle avait inventé le fachisme? Aimer sera toujours plus grave que trahir.
Maria Denis n’était hélas pas au bout de ses amères surprises: Lorsqu’elle argumentera avoir de par sa liaison sauvé la famille Visconti d’un sort funeste et fait libérer ce dernier alors emprisonné, aucun des membres de la famille ne daignera lever le petit doigt pour la défendre. Humiliée, meurtrie, Maria Denis ne sera jamais véritablement blanchie aux yeux du public italien qui pardonna bien plus facilement à Viviane Romance ou Danielle Darrieux leurs sympathies supposées.
Elle ne retrouvera jamais son prestige qui était le sien et tirera bientôt sa révérence filmée après quelques rôles qui n’apportèrent plus rien à sa gloire même en s’internationalisant.
Elle deviendra une décoratrice très prisée et bientôt la jet set italienne, volontiers plus oublieuse que le peuple, sans doute parce qu’ayant moins souffert, se pressera aux dîners mondains et autres garden parties que donnera Maria Denis dans sa fabuleuse propriété de la Via Appia où Gina Lollobrigida s’invitera sans façons puisqu’elle habite la villa voisine!
Bientôt le carnet de commandes de la décoratrice en vogue fut plus fourni que la liste des films en attente que la star d’autrefois avait à tourner.
L’illustre décoratrice de la via Appia s’éteignit dans sa somptueuse demeure le 15 Avril 2004 à l’âge de 87 ans.
Celine Colassin.
QUE VOIR?
1932: La Téléphoniste: Avec Isa Pola
1933: Non C’è Bisogno di Denaro: Avec Luigi Almirante.
1934: Creature Della Notte: Avec Piero Carnabuci, Isa Miranda et Isa Pola
1936: 1860: Avec Aida Bellia et Guiseppe Guilno
1938: La Comptesse de Parme: Avec Elisa Cegani
1940: Addo, Giovinezza: Avec: Adriano Rimoldi et Clara Calamaï
1940: Abbandono: Avec Corinne Luchaire.
1942: La Maestrina: Avec: Nino Besozzi
1942: La Vie de Bohème: Avec Louis Jourdan
1947: Nada: Avec Rafael Bardem.
1949: Private Angelo: Avec Peter Ustinov et James Robertson Justice