En 1966, la presse dédiée au cinéma est en émoi. Steve McQueen, considéré « L’homme le plus sexy 1966″ tourne en Thaïlande « La Canonnière du Yang Tsé » face à Candice Bergen et Richard Attenborough. Mais il y a dans le film, un autre rôle féminin dévolu à une beauté locale encore inconnue la veille: Marayat Adriane.
Cette gracieuse demoiselle est née en 1932, à Bangkok, alors capitale du Siam, sous le pseudonyme de Marayat Bibidh. A 16 ans la demoiselle a épousé un diplomate français alors en poste à Bangkok: Louis-Jacques Rollet Andriane.
Lorsqu’elle est choisie pour rejoindre le tournage très prestigieux de Robert Wise, elle a donc, mine de rien, déjà 34 ans et a déjà commis ce qui fera sa gloire et sa célébrité avant de tourner le film. Car ce n’est pas grâce au cinéma que Marayat connaîtra la célébrité. Son mari, très inspiré par sa beauté, a commis un roman, lequel dévoile les aventures d’une jeune femme très intéressée par sa propre sexualité qu’elle explore d’aventures en aventures comme d’autres recherchent le saint Graal.
Mais pour un très sérieux diplomate, commettre des œuvrettes érotiques ne fait pas forcément partie intégrante des fonctions attendues ou des loisirs convenus. Aussi le prudent personnage proposa à sa jeune épouse de prendre à sa charge la responsabilité de l’oeuvre. On chercha un pseudonyme, on choisit Emmanuelle afin de donner à la chose un air de « vécu », nous ne dirons pas d’autobiographie, et on publia en 1959. La belle auteure supposée, Emmanuelle Arsan, blaze « littéraire » de Marayat Andriane avait alors 27 ans et était d’une beauté exotique à couper le souffle. Le roman connut un succès intersidéral malgré les qualités qu’il n’avait pas et se vendit à plusieurs millions d’exemplaires en quelques jours! La star érotique de la littérature était née. Le texte avait Emmanuelle Arsan comme la peinture avait Léonore Fini. L’heure était décidément à la libération féminine tous azimuts!
Donc en fait, pour résumer, Marayat Andriane, actrice d’un seul film, est en fait Emmanuelle Arsan, auteure du roman « Emmanuelle »…Qu’elle n’a pas écrit.
En 1974, le roman était porté à l’écran, il faisait un triomphe en salles après l’avoir fait en librairie, Sylvia Kristel devenait une star planétaire, le film aurait des suites et les ventes de fauteuils en rotin allaient exploser. La belle Emmanuelle Arsan était plus que jamais le personnage le plus en vue de la sphère médiatique puisque croyait-on elle était la « vraie » Emmanuelle. On annonça donc avec fracas qu’elle passait à la mise en scène et allait créer un nouveau personnage érotique, mais au cinéma cette fois: « Laura ».
Qui l’aurait-cru, Marayat ne dirigea pas plus qu’elle n’écrivit et c’est son infatigable mari qui passa secrètement derrière les caméras.
Mais il est moins évident de berner tout le monde sur un plateau de cinéma que seul avec une machine à écrire dans son bureau.
Marayat dite Emmanuelle Arsan refusa de signer le film, son mari prétendit qu’il le lui avait interdit et finalement la chose sortit réalisée par…Personne! Rejoignant ainsi « Macédoine » dans le cercle très fermé des films sans réalisateur crédité au générique! Dans tout cet aimable charivari, le couple avait trouvé le temps d’avoir deux charmantes petites filles.
Marayat décède le 12 juin 2005 à l’âge de 73 ans. Marayat souffrait de sclérose. Après une première attaque alors qu’elle n’avait que 20 ans, la maladie la laissera vivre une longue rémission de 49 ans. Elle était revenue frapper Marayat en 2001. Ses souffrance pour avoir été longtemps retardées n’en seront que plus atroces. Les crises sont de plus en plus violentes et de plus en plus rapprochées. Ce sont ses jambes qui sont le plus atteintes. Les douleurs sont atroces, rine ne peut les apaiser. L’amputation des deux jambes au dessus des genoux est nécessaires. Marayat passera les quatre dernières années de sa vie alitée et objet de soins médicaux constants. Son mari dont elle avait fait un veuf lui dédiera un ouvrage et la suivra dans la mort en 2008.
Celine Colassin
QUE VOIR?
1966: La Canonnière du Yan Tsé: Avec Richard Attenborough, Steve McQueen et Candice Bergen
1976: Laure: Avec Annie Belle