La charmante Lyne Chardonnet, douce et blonde sylphide aura vu sa courte vie marquée du sceau de la malchance.
Lyne Catherine Jeanne Chardonnet naît dans un Paris occupé le 5 mai 1943. Ce qui n’est déjà pas très gai. Cette charmante jeune demoiselle se rêvait comédienne. Elle était devenue une jeune fille ravissante, sorte de blonde Yseult, version rajeunie et très modernisée de la Madeleine Sologne de « L’Éternel Retour ». Mais non contente d’être belle, elle avait un type féminin qui existait et faisait fureur depuis l’invention du théâtre: celui de la jeune ingénue. Et, chance pour elle, le type faisait à nouveau fureur en cette fin des années 60 où le cinéma avait soudain soif de « vraies jeunes filles ». On les aimait bien élevées, blondes de préférence et leurs jupes d’autant plus courtes que leurs cheveux étaient longs. Le yé-yé passait aussi par les pensionnats pour jeunes filles de bonnes familles. Lyne sortait du conservatoire en 1967 avec un double prix: comédie et comédie classique.
Quelques demoiselles allaient bientôt se partager l’emploi « jeune fille », Catherine Deneuve en tête, secondée par Anna Gaël, Marie-France Boyer, Claude Jade, Brigitte Fossey, Geneviève Grad, Jeanne Valérie et quelques autres juvéniles beautés comme Jill Hayworth ou Edy Vessel.
Lyne fit de timides débuts dans « La Guerre est finie » film où brillaient Geneviève Bujold, Ingrid Thulin et Yves Montand. Elle passa malheureusement presque inaperçue et ses films suivants allaient hélas reproduire le même schéma. De grosses productions souvent internationales, des distributions prestigieuses où l’on croise Ava Gardner, Michèle Morgan , Catherine Deneuve, Jean Gabin, Jacques Brel, Louis de Funès. Mais hélas la pauvre Lyne, blonde comme les blés passe pratiquement inaperçue dans leur ombre. Dans « Clérambard » son rôle n’a aucun intérêt à croire qu’il a été éradiqué au montage et dans le peu de scènes qui lui restent, elle se dissous derrière l’abattage de Dany Carrel et Martine Sarcey très en forme et en verve!
Pourtant Lyne n’est pas que délicieusement belle, elle est aussi une fine comédienne et n’hésitera pas à se « jeter au feu » en menant tambour battant quelques pièces pour « Au Théâtre ce Soir ». La télévision, bien sûr fait appel à ses gracieux services mais son plus grand titre de gloire télévisé rester « Les Gens de Mogador » où cette fois Marie José Nat, Jean-Claude Drouot et Marie-France Pisier avaient brillé de mille feux.
Il est d’ailleurs étonnant qu’avec une telle activité débordante et un tel physique, l’actrice n’ait pas connu une notoriété plus flamboyante.
Ainsi, alors que le public des salles obscures la découvrait dans « L’œuf », la télévision s’apprêtait à diffuser « Les Gens de Mogador » , elle jouait au théâtre »Les Poissons Rouges » d’Anouilh après avoir terminé « Interdit au Public » et « Chat en Poche ». Elle répétait avec Rufus « Auguste, Auguste » et elle faisait du trapèze avec Jean-Claude Drouot au gala de l’union des artistes. Horriblement superstitieuse, elle s’effrayait lorsqu’on lui prédisait un bel avenir sur sa lancée. La jolie Lyne aurait adoré y croire mais quelque chose en elle s’y refusait.
Elle avait enregistré trois émissions à la télévision: « Pas Moral pour deux sous » qui allait mettre un an et demi avant d’être diffusée et passer très vite à la trappe. « Tour de Chant » et « La Bonne Nouvelle » resteront à jamais dans les tiroirs aux rossignols.
Finalement, à l’époque de ses débuts très inaperçus, c’est encore son mariage avec Paul Loup Sulitzer, écrivain très à la mode en 1968 et ex plus jeune PDG de France qui fit le plus parler d’elle et fait connaître son nom au grand public. Elle resta longtemps « la femme de Sulitzer » dans l’esprit des Français qui ignoraient que neuf mois après leur mariage, (et non les deux sottement avancés par Wikipédia) Lyne avait repris sa liberté et fui le célèbre appartement conjugal parisien de 400 mètres carrés.
Avait-elle appris qu’avant de l’épouser, l’homme le plus ambitieux de Paris avait, à Saint Tropez, fait le siège de Brigitte Bardot? BB qui l’avait balayé d’un revers de main dans les poubelles estivales de Natalie Wood alors en villégiature dans le Var. La jeune divorcée allait commenter: « C’était un mariage d’amour entre deux personnes bien trop jeunes pour qu’il dure. Et puis mon mari ne voulait pas d’une femme qui travaille et c’était hors de question que je renonce à ma carrière. » (Aurait-il exigé de Brigitte Bardot et Natalie Wood qu’elles quittent les studios pour sa cuisine et sa buanderie?)
Côté carrière elle allait également subir un étrange retour de manivelle. Soudain son genre se démoda. Tout simplement, on n’écrivit plus de rôles pour ce genre de personnage encore incontournable six mois plus tôt. Adieu Jill, Geneviève, Anna, Marie France. Seule Catherine Deneuve conserva son trône en s’embourgeoisant et surtout en se pervertissant sous les houlettes respectives d’Yves Saint Laurent et de Luis Bunuel. Lyne sacrifia sa chevelure, sa marque de fabrique des jeunes années mais rien n’y fit. Les films perdirent en prestige, ses rôles ne gagnèrent pas en intérêt. Bernard Menez succédait à Omar Sharif et Roger Hanin à Alain Delon.
Heureusement, si sa carrière ne prenait pas l’envol tant espéré, elle travaillait quand même beaucoup, ce qui n’était pas donné à beaucoup de comédiens. Elle vivait enfin une belle et discrète histoire avec le scénariste-réalisateur Jacques Cortal. Le couple aura une fille, Léa née le 28 Juillet 1974. Elle commentera ce nouveau bonheur: « Je suis folle de mon nouveau compagnon et il ne peut pas en être autrement car si je n’aime pas assez je m’en vais, l’amour pour moi c’est Roméo et Juliette, je suis passionnée, exclusive, terriblement fidèle et effroyablement jalouse. Les concessions n’ont rien à faire avec l’amour et si j’étais trompée il y aurait un mort ou deux dans la rubrique des faits divers dès le lendemain matin«
Mais ce bonheur là sera anéanti par la maladie. Un cancer du foie saccage la jeune comédienne qui décède le 11 Décembre 1980. Elle n’avait que 37 ans et sa petite Léa n’en avait que sept.
Jacques Cortal restera longtemps inconsolable et exorcisera sa douleur en écrivant et produisant un court métrage « Le Dernier Jour » en 1980, puis en 2002 il fait de Lyne un des personnages de « Quand je vois le Soleil ». l’actrice sera incarnée à l’écran par Marie-Claude Pietragalla.
Celine Colassin
QUE VOIR?
1966: la Guerre est Finie: Avec Yves Montand
1967: A Time for Loving: Avec Britt Ekland et Joanna Shimkus
1968: le Tatoué: Avec Jean Gabin et Louis de Funès
1968: Benjamin ou les Mémoires d’un Puceau: Avec Catherine Deneuve et Michèle Morgan
1968: Mayerling: Avec Catherine Deneuve, Ava Gardner et Omar Sharif
1969: Clérambard: Avec Dany Carrel, Martine Sarcey et Philippe Noiret
1969: Mon Oncle Benjamin: Avec Claude Jade et Jacques Brel
1969: Bruno, l’enfant du Dimanche: Avec Marika Green, Roger Hanin et Mary Marquet
1969: Je tu elles: Avec Bernadette Lafont, Francis Blanche et Juliet Berto
1972: A Time for Loving: Avec Joanna Shimkus et Britt Ekland
1972: Je, Tu, Elles: Avec Jacqueline Coué, Bernadette Laffont et Anémone
1972: L’Oeuf: Avec Marie Dubois, Bernadette Laffont et Guy Bedos
1974: Le Protecteur: Avec Juliette Berto, Bruno Cremer, Roger Hanin et George Géret
1974: Dada au Coeur (Les Trois Coups) : Avec Roger Blin et Yves Chériaux
1976: Dracula père et Fils: Avec Christopher Lee, Bernard Menez et Marie-Hélène Breillat
1976: Le Jouet: Avec Pierre Richard
1979: Lady Oscar: Avec Catriona MacColl et Barry Stokes
1980: Une Merveilleuse Journée: Avec Bernadette Laffont, Daniel Ceccaldi et Michel Galabru
1981: Chanel Solitaire: Avec Marie-France Pisier et Timothy Dalto
1977: L’Homme Pressé: Avec Alain Delon et Mireille Darc
1980: Trois Hommes à Abattre: Avec Alain Delon, Dalila di Lazzarro et Michel Auclair.
Bonjour,
Je suis le frere de lyne
Merci de votre article