Le 10 Juin 1937, la belle Luciana Paluzzi naît à Rome.
On ne saura que peu de choses sur les origines et les jeunes années de la belle. Son père était officier dans l’armée du Duce et la discipline à la maison était assortie aux fonctions paternelles. Ceci n’empêchait pas la jeune demoiselle de rêver à la gloire filmée de celles qui l’avaient précédée sur les écrans nationaux. La petite Luciana ayant grandi les yeux rivés sur les comportements hollywoodiens plus grands que nature des diva mussoliniennes et vu Cinecitta sortir de terre l’année de sa naissance. Mais avec un papa militaire, il valait mieux poursuivre de sérieuses études, Luciana décréta qu’elle deviendrait ingénieur naval.
La petite demoiselle débuta très tôt au cinéma, elle avait été choisie à quinze ans par Mario Basiglia pour donner la juvénile réplique à Ugo Tognazzi et Jacques Sernas dans « Sua altezza ha detto no! ». Un rôle minuscule encore, la vedette du film étant Elena Giusti.
Il serait cependant faux de croire que Luciana n’eut qu’à promener une fracassante silhouette dans les rues de Rome pour mettre les producteurs à ses pieds et faire de grandioses débuts d’aphrodisiaque filmé. L’adolescente de quinze ans n’est pas encore l’étourdissante créature qui mettre le feu d’un regard de braise au costume pourtant ignifugé de Sean Connery alias James Bond dans « Jour de Tonnerre ». Elle avait certes posé pour quelques photos de mode mais pas dans les dernières créations Dior! Un peu de prêt à porter, tout au plus.
La jeune Luciana qui ne sera jamais très grande a gardé longtemps les douces rondeurs de l’enfance et est mieux faite pour jouer les gentilles filles cadettes de paysans des Abruzzes que les James Bond Girls. Il suffit pour s’en convaincre de revoir « En Effeuillant la Marguerite » où elle est Sylvia, la gentille copine et confidente un peu cruche de Brigitte Bardot. Elle est alors au sex-appeal ce que la Fiat est à la Ferrari.
Mais le premier film de Luciana était une coproduction internationale, ce qui était alors la grande règle du cinéma. Comme Sandra Milo, la jeune actrice découvrira très vite le cinéma américain puisque dès l’année suivante, elle rejoint le casting d’une super production hollywoodienne qui se tourne à Rome: « Three Coins in the Fountain » avec Louis Jourdan, Jean Peters, Dorothy MacGuire, Rossano Brazzi et Maggie MacNamara. C’est ensuite Pierre Gaspard Huit qui l’invite en France pour donner la réplique à Brigitte et Daniel Gelin.
Dès ses débuts, Luciana sera donc confrontée aux plus belles femmes du cinéma mondial dont Brigitte, Virna Lisi, Sylvia Koscina, Jean Peters ou Debra Paget. Mais la charmante adolescente grandit, elle gagne en métier mais surtout en beauté et peut bientôt prétendre, elle aussi, faire tourner les têtes les mieux vissées et donc aller vers de beaux grands premiers rôles de séductrices et autres femmes fatales faisant se tétaniser d’amour ses mâles partenaires d’un savant battement de faux-cil.
C’est elle maintenant qui affole les populations de spectateurs en haut des affiches. Sa réputation d’actrice puis de vedette s’étoffe aussi bien en Italie qu’en Amérique ou en France. Luciana Paluzzi est une « vedette internationale » mais une vedette qui n’ a pas encore trouvé le film qui fera d’elle une star.
Par contre, à la faveur d’un tournage elle avait rencontré l’amour en la personne de l’acteur Brett Halsey. Luciana rencontre Brett sur le plateau de »Five Fingers », une série télévisée à succès où il tient un rôle récurrent. Quatre jours après leur première rencontre il la demande en mariage et Luciana confiera: « J’ai accepté plus flattée que convaincue, en Italie le divorce est interdit et on réfléchit longuement avant de se marier, on peut rester des années simplement fiancés avant de se lancer dans une union irréversible. Qu’un homme soit assez sûr de lui pour vouloir m’épouser après quatre jours m’a fait croire qu’il m’aimait au moins autant que Roméo aimait Juliette! »
Brett Halsey qui avait d’abord tenté la gloire sous le pseudonyme un tantinet ronflant de Montgomery Ford ne trouva jamais la véritable notoriété sous quel nom que ce soit. Mais il tourna malgré tout un nombre saisissant de films, tous de série B. Il allait recevoir le golden globe de « Nouvelle star de l’année » en 1961, à 28 ans, alors qu’il tournait régulièrement depuis l’enfance. Brett et Luciana se marièrent en 1960 à Las Vegas. Le couple avait dû attendre que le divorce soit officiellement prononcé entre Brett et Renate Huy, la seconde épouse de Brett, Miss Allemagne 1952, actrice sous contrat chez Universal et accessoirement, mère des deux enfants de l’acteur.
En 1962 ils étaient divorcés mais un fils , Christian, était venu couronner cette union malheureuse. La séparation de ces deux-là fut pour le moins retentissante! Le couple s’était marié civilement à l’hôtel Sand’s de Las Vegas mais Luciana n’étant pas italienne pour rien avait exigé un mariage religieux et selon la principale intéressée « Nous avons commencé à nous quereller que nous étions encore sur les marches de l’église! » Luciana finira par reprendre le chemin de l’Italie…enceinte de huit mois. Après la naissance de son enfant, Luciana demande par tribunaux interposés une pension alimentaire pour elle et son fils. Le mari plaqué ne l’entendit pas de cette oreille, il accusa Luciana de « cruauté mentale » et dans la foulée porta plainte contre elle pour « avoir emmené abusivement son fils hors des USA » ce qui fit quand même bien rire.
Plusieurs fois Luciana porta plainte pour violences physiques et morales et emporta son divorce haut la main. Son ex mari allait ensuite épouser la belle Allemande Heidi Brühl. Luciana quant à elle se déclara guérie à tout jamais d’envies conjugales, terrorisée à l’idée de revivre un tel calvaire!
Sa liberté retrouvée miss Paluzzi, qui fut la première Italienne à être divorcée (puisque son mariage était Américain, la loi italienne ne s’opposait pas au divorce) continua sa prolifique carrière mais elle non plus ne trouvait pas « le » rôle dans « le » film qui allait la propulser au sommet. Elle devrait attendre 1965 et « Thunderball ».
L’anecdote est connue, Luciana avait été choisie pour le film puis soudainement renvoyée alors qu’elle avait commencé à tourner pour faire place à Claudine Auger qui héritait de son rôle du jour au lendemain. Luciana Paluzzi commence donc le tournage de Thunderball dans le rôle de Domino avant de changer au profit de Claudine Auger et devenir la méchante Fiona. Elle dut, je le présume, en tous cas, être mortifiée d’être ainsi destituée d’un rôle. Mais la production au vu des scènes déjà tournées par Luciana eut la sagesse de la rappeler pour lui confier le rôle de la « méchante » dans le film.
Je ne reviendrai pas sur le phénomène « James bond girls » qui faisait de ces demoiselles des stars planétaires avant même que le film ne sorte. Luciana croula sous les contrats, regagna Hollywood par la grande porte, foulant de ses talons aiguilles des kilomètres de tapis rouges et se plaignait quand même un peu: »Hollywood est devenu décevant, on ne s’y habille plus, on voit des femmes en pantalons même le soir! Les robes longues ne sortent plus qu’une fois par an pour la cérémonie des Oscars, et encore! Il me tarde de regagner la France où l’on peut encore s’habiller pour sortir dîner avec un homme sans être ridicule! »
Mais bientôt, alors qu’elle devenait une star du cinéma espagnol après avoir conquis l’Italie, l’Amérique et la France, Luciana allait trouver d’autres raisons de se plaindre.
« Avec James Bond j’ai acquis une renommée inouïe mais paradoxalement la qualité des rôles qu’on me propose a considérablement baissé comme si les réalisateurs m’avaient retiré leur confiance; ils me considèrent maintenant comme une James Bond girl et plus comme une actrice sérieuse«
Et la belle voyait juste. Elle allait encore beaucoup tourner, au cinéma comme pour la télévision mais la qualité des films où elle se produisait allait diminuant et après avoir sévi dans un OSS 1117 elle allait découvrir les joies du western spaghetti de seconde catégorie avant d’échouer dans des comédies érotico-polissonnes des années 70 où elle allait d’ailleurs croiser Ursula Andress elle aussi recyclée en strip-teaseuse pour bidasses décérébrés.
En 1978, Luciana Paluzzi raccrochait son attirail d’ex James Bond girls et prenait une retraite définitive.
Elle allait se remarier en 1980 avec Michael Solomon et le couple allait s’installer à Bel Air en Californie.
Celine Colassin
QUE VOIR?
1953: Sua Altezza ha detto no! : Avec Elena Giusti, Jacques Sernas et Ugo Tognazzi
1954: Three Coins in the Fountain: Avec Maggie MacNamara, jean Peters, Louis Jourdan, Clifton Webb et Rossano Brazzi
1954: J’avais Sept Filles: Avec Delia Scala et Maurice Chevalier
1954: Il Vetturale del Moncenisio: Avec Virna Lisi et Roldano Lupi
1955: Adriana Lecouvreur: Avec Valentina Cortèse et Gabriele Ferzetti
1955: La Châtelaine du Liban: Avec Gianna Maria Canale, Jean-Claude Pascal et Jean Servais
1956: En Effeuillant la Marguerite: Avec Brigitte Bardot et Daniel Gelin
1958: Sea Fury: Avec Stanley Baker et Victor MacLaglen
1958: Le fatiche di Ercole: Avec Sylvia Koscina, Gianna Maria Canale et Steve Reeves
1958: No Time to Die: Avec Victor Mature
1959: Il marito bello: Il nemico di mia moglie: Avec Giovanna Ralli et Marcello Mastroianni
1959: Le Tigre du Bengale: Avec Debra Paget et Paul Hubschmid
1959: Le Tombeau Hindou: Avec Debra Paget et Paul Hubschmid (Luciana est créditée au générique mais je ne l’ai vue nulle part!)
1960: Journey to the Lost City: Avec Debra Paget et Paul Huschmid
1961: Return to Peyton Place: Avec Carol Lynley, Jeff Chandler et Eleanor Parker
1962: The Reluctant Saint: Avec Léa Padovani et Maximilian Schell
1963: Le Vice et la Vertu: Avec Catherine Deneuve, Annie Girardot et Robert Hossein
1964: Muscle Beach Party: Avec Annette Funicello et Frankie Avalon
1967: The Venetian Affair: Avec Elke Sommers, Robert Vaughn et Felicia Farr
1967: Chuka: Avec Ernest Borgnine et Rod Taylor
1968: The Green Slim: Avec Robert Horton
1969: Capitain Nemo and the Underwater City: Avec Robert Ryan et Chuck Connors.
1969: Il pistolero dell’Ave Maria: Avec Léonard Mann
1971: Il Sergente Klems: Avec Tina Aumont et Peter Strauss
1971: Le Tueur Frappe Trois Fois: Avec John Mills et Robert Hoffman
1971: The Green Slim: Avec Robert Horton
1973: La polizia sta a guardare: Avec Lee J. Cobb et Enrico Maria Solerno
1974: Noventa y Nueves Mujeres: Avec Maria Schell
1975: L’Infermiera: Avec Ursula Andress, Duilio del Prete et Jack Palance
1976: Gli Amici di Nick Hezard: Avec Luc Meranda
1978: The Greek Tycoon: Avec Jacqueline Bisset et Anthony Quinn
1978: Il commissario Verrazzano: Avec Janet Agren et Luc Merandanda