Le 24 février 1905 naquit à Vienne Henrieta Margaret Hiebel, dite » Henny » dans la famille, sa grande soeur est « Anny ».
la famille quittera Vienne pour Francfort, Anny se destine à l’opéra, Henny choisit la danse.
La petite fille grandit bercée par la légende de l’étrange danseuse exotique Mata Hari.
Lorsque celle-ci sera exécutée pour espionnite aiguë ou sois-disant telle, la jeune Henny se dit qu’il y avait peut-être une place à prendre. La succession de son idole! Et pourquoi pas? Elle travailla en ce sens et bientôt s’auto-proclama « danseuse exotique » sous l’étrange pseudonyme de « La Jana »
Excellente danseuse et d’une beauté racée et androgyne, La Jana pouvait se permettre de porter les tenues de scène les plus révélatrices du monde, le bourgeois bien pensant ne s’offusquerait pas, c’était bel et bien de l’art.
La Jana se pressente pour la première fois sur la scène d’un cabaret berlinois en 1921 et le succès est d’emblée foudroyant bien qu’elle improvise encore ses danses! Très vite le nom de « La Jana » va faire flamber l’imaginaire européen, la merveille exotique parcourt l’Europe en tournées, de l’Italie à la Scandinavie.
Max Reinhardt lui-même la met en scène, la faisant transporter demi nue en scène sur un plateau d’argent.
Le cinéma bien entendu ne pouvait ignorer l’existence d ‘un tel phénomène et dès 1924 des films à la gloire de son mystère, de sa beauté, et il faut bien le dire de son talent se tournent de l’Allemagne à la Suède.
le public se presse pour découvrir cette exotique créature, prometteuse de frissons avec des titres de films tels que « la Geisha Blanche » ou « La Femme Nue ». La vie privée de la star s’étale aussi complaisamment que ses photos légères dans les journaux. On comptabilise la liste de ses amants riches et célèbres avec un sourire et un intérêt délicieusement scandalisé.
Les origines de cette belle personne étant très énigmatiques, elle n’est pas Allemande ou Suédoise et peut donc tout se permettre!
On relèvera parmi son cheptel d’admirateurs des altesses royales, des acteurs célèbres et même un certain Joseph Goebbels. On se croirait revenus au temps des grandes cocottes parisiennes!
Avec l’arrivée du cinéma parlant, l’étoile de La Jana grandit encore! On entend maintenant non seulement la musique de ses danses mais aussi son chant de rossignol, et pour couronner le tout, ma foi et contrairement à toutes les idées préconçues, elle se révèle bonne actrice et se risque parfois dans des films dramatiques où il est peu question de danse des sept voiles. La Jana mène donc une carrière très prestigieuse jusqu’à l’avènement du troisième Reich où elle reste très en vue…Jusqu’à la déclaration de guerre à l’Allemagne.
Guerre dont elle est peut-être la première victime, funeste présage pour le troisième Reich.
Goebbels la sollicite pour un spectacle aux armées afin d’éblouir et motiver les troupes fraîchement levées avant leur départ au front.
la Jana s’exécute après avoir bouclé son dernier tournage: »L’Etoile de Rio »
La Jana joue, chante et danse presque nue pour les militaires sur le départ dans le froid de Février.
Terrassée par une double pneumonie, elle s’éteint emportée par la maladie le 13 Mars 1940.
Le troisième Reich ne sut pas très bien que faire de cette mort, ou plus exactement comment l’exploiter à des fins propagandistes.
Il fut décidé que la tombe de la star serait un monument digne de son prestige, oeuvre des architectes nationaux socialistes mais on ne fit pas trop de bruit autour du décès de l’artiste.
Nombreux furent ceux qui l’applaudirent dans « L’Etoile de Rio », ignorant que la star n’était plus.
La tourmente emporta l’Allemagne et le monde, le souvenir de La Jana fut balayé.
La guerre terminée, elle était complètement oubliée. Sa tombe monumentale ayant survécu aux bombardements, elle fut néanmoins détruite, on manquait de place dans les cimetières et personne ne payait plus le coûteux entretient du pompeux édifice à la mémoire d’une gloire oubliée.
En 1985, pour les 80 ans de La Jana, la ville de Berlin fera ériger une nouvelle tombe bien plus modeste à sa mémoire, sur le lieu présumé de l’ancienne.
Celine Colassin
QUE VOIR?
1924: La Geisha Blanche
1926: La Dame sans Voiles
1928: Le Manteau de Castor
1928: Thérèse Raquin: Avec Gina Manès
1929: L’Intermède Espagnol
1934: Vice-Versa
1938: Les Etoiles Brillent