Ingrid Thulin fut beaucoup et souvent comparée à Greta Garbo et Ingrid Bergman. Cela n’est dû qu’a sa nationalité suédoise car c’est bien là la seule chose qu’elle ait eu en commun avec ses deux illustres compatriotes! Ingrid Thulin naît le 27 Janvier 1926 à Sollefteå en Suède. Fille d’un marin pêcheur qui ne rêve pour sa petite fille rien de plus merveilleux qu’un emploi de secrétaire gardera le secret sur sa vocation artistique pourtant brûlante jusqu’à ses 17 ans. Papa est un peu trop penché sur la dive bouteille, maman compense la situation familiale délicate par un excès d’autorité!
17 ans c’est l’âge où elle peut gagner la grande ville, gagner la capitale, gagner Stockholm. Certes pas pour y devenir une superstar des planches ou des écrans mais pour y faire sagement et comme promis de bien braves études commerciales. Mais ce que la jeune fille n’avait pas promis, c’était de rester sagement à étudier dans sa chambre entre les cours. Elle se déniche très vite un petit boulot d’employée de bureau et utilise son salaire pour s’offrir des leçons d’art dramatique et de danse.
Et pour la jeune apprentie artiste, les choses vont admirablement s’emboîter, à la mode suédoise, mieux encore qu’un meuble IKEA!
Un de ses professeurs lui offre une petit panne, à peine un rôle, pour lui venir en aide, dans la pièce qu’il joue au théâtre Norrköping City. Nous sommes en 1947, notre héroïne a encore 20 ans pour quelques semaines. Elle est belle comme un ange et respire une bonne santé qui fait plaisir à voir maintenant que la guerre est finie. Elle va bientôt symboliser pour la Suède l’espoir d’une nouvelle génération, un peu comme Gérard Philipe en France ou Lucia Bose en Italie..
En 1948, Ingrid a si bien servi le théâtre qu’elle obtient une bourse d’étude pour l’académie royale d’art dramatique dont elle suivra scrupuleusement l’enseignement pendant deux ans. Mais le cinéma aussi avait remarqué cette fraîche jeune fille dès ses premières apparitions. Elle tourne son premier film alors même qu’elle est reçue à l’académie royale.
Ingrid Thulin devient dès 1950 une jeune actrice en vogue, se partageant entre théâtre et cinéma, une jeune fille « à la mode », une jeune fille « connue », mais pas encore célèbre, elle n’est pas une star ni même une grande vedette, et pour tout dire elle s’en fiche un peu. Son destin va basculer de manière très inattendue: Lorsqu’elle rencontre le directeur du théâtre municipal de Malmö où elle doit jouer, un certain Ingmar Bergman.
Jeune encore, il n’a que huit ans de plus qu’Ingrid, il la fascine par sa conception très intellectualisée du théâtre. Mais soyons justes, Ingrid le fascine tout autant. Il fait d’elle une de ses interprètes fétiches, pour ne pas dire une de ses muses. C’est une chance d’autant plus grande pour la belle Ingrid qu’Ingmar Bergman s’intéresse de plus en plus au point de vue des personnages féminins de ses films. Les actrices y auront désormais la part belle, les acteurs se contenteront de personnages plus typés, presque anecdotiques. Bergman dirige pour la première fois Ingrid Thulin au cinéma dans « Les Fraises Sauvages » en 1957. L’année suivante c’est « Au Seuil de la Vie » dont elle partage l’affiche avec Bibi Anderson et Eva Dahlbeck. Le jury du festival de Cannes ne pourra se décider entre les trois actrices et elle devront se partager le grand prix d’interprétation féminine.
Bergman aime à enlaidir son actrice dans ses films à un point tel que le public finira par lui en vouloir de « gâcher » une aussi belle personne. Ingrid de son côté s’en montre très satisfaite, lassée déjà de son image de « belle fille de ferme grandie au lait cru » dans laquelle l’avaient cantonnée les cinéastes de ses débuts.
Ingrid Thulin est donc une actrice très occupée durant toutes les années 50. Sans cesse présente au théâtre, elle tourne une moyenne de deux films par an et est de plus en plus présente à la télévision. Elle trouve malgré tout le temps de devenir madame Claes Sylwander qu’elle épouse en 1952 pour divorcer en 1955. Elle épouse dès son divorce prononcé épouse Harry Schein. Un mariage qui cette fois durera jusqu’en 1989.
Madame Ingrid Schein, sollicitée de partout eut une petite préférence pour l’Italie et s’installa dans une somptueuse villa non loin de Rome. Elle tourna des films, comme actrice et parfois comme metteuse en scène, monta des pièces et donna même des cours de théâtre à quelques privilégiés qui n’en sont pas encore revenus.
Il faut la voir aux heures les plus internationales de sa gloire en luxueuse baronne dans « Les Damnés » , en tenancière de bordel dans « Salon Kitty! Le tout avant de séquestrer son mari volage Lino Ventura dans « La Cage » puis s’affoler pour le sort des passagers d’un train contaminé avec Ava Gardner et Sophia Loren à son bord dans « Le Pont de Cassandra »!
Le cinéma évoluant, elle se montrera nue elle aussi, pourquoi pas? Mais pour Luchino Visconti, soyons sérieux! Pas pour Play-boy! Elle tournera pour le cinéma jusqu’en 1991, toujours dirigée par les plus grands, elle tire sa révérence après un film de Marco Ferreri!
Au début des années 2000, l’impeccable mécanique céleste qu’avait été la vie d’Ingrid Thulin se dérègle. La grande vedette internationale est frappée par le cancer. Restée suédoise jusqu’au bout de sa longue chevelure blonde, elle ne fit confiance qu’à ses compatriotes et regagna Stockholm.
Elle s’y éteindra des suites de sa maladie le 7 Janvier 2004.
Le monde en fut estomaqué! Ingrid Thulin morte! C’était invraisemblable! C’était dramatique! Mourir si jeune! C’est que voyez-vous, Ingrid avait beau avoir fêté ses 77 ans, son insolente beauté de robuste fille de ferme nourrie au bon lait cru faisait qu’on ne lui en donnait que la moitié!
Et encore…
Celine Colassin.
QUE VOIR?
1950: När Kärleken Kom till Byn: Avec Ruth Kasdan et Sven Lindberg
1953: Möte Med livet: Avec Doris Svedlund
1955: Hoppsand! Avec Harriet Anderson et Sven Lindberg
1957: Aldrig Livet: Avec Arne Ragneborn
1957: Les Fraises Sauvages: Avec Bibi Anderson
1958: Le Visage: Avec Max von Sydow et Bibi Andersson
1962: The Four Horsemen of the Apocalypse: Avec Glenn Ford et Charles Boyer
1962: Agostino: Avec Paolo Colombo et John Saxon
1963: Sekstet: Avec John Kelland
1963: Le Silence: Avec Gunnel Lindblom
1963: Les Communiants: Avec Gunnel Lindblom
1964: Die Lady (Un Certain Désir): Avec Claudine Auger et Bernard Verley
1965: Hängivelse (court métrage d’Ingrid Thulin) avec Allan Edwall
1965: Return from the Ashes: Avec Maximilian Schell et Herbert Lom
1966: La Guerre est finie: Avec Yves Montand
1968: Adélaïde: Avec Jean Sorel et Sylvie Fennec
1968: Un Diablo Bajo la Almohada: Avec Maurice Ronet et Gabriele Ferzetti
1968: Bardana: Avec Halvar Björk
1968: Vargtimmen (L’Heure du Loup) D’Ingmar Bergman avec Liv Ullmann et Max von Sydow
1969: Les Damnés: Avec Dirk Bogarde et Helmut Berger
1972: Cris et Chuchotements: Avec Liv Ullmann et Harriet Andersson
1973: N.P. il Segreto: Avec Irène Papas et Francisco Rabal
1975: Monismanien 1995: Avec Harriet Anderson et Erland Josephson
1975: La Cage: Avec Lino Ventura
1976: Cassandra Crossing: Avec Burt Lancaster
1976: Salon Kitty: Avec Helmut Berger
1984: Après la répétition: Avec Léna Olin et Erland Josephson
1987: Il giorno prima (le Contrôle) Avec Kate Nelligan et Ben Gazzara
1991: La casa del sorriso: Avec Dado Ruspoli et Maria Mercader