Ah! quel patronyme parfait pour se lancer à la conquête de la gloire hollywoodienne!
Glenda Farrell! Ca claque comme un nom de star sublime! Rita Hayworth ou Lana Turner auraient pu s’appeler Glenda Farrell! Ce ne sera malheureusement pas suffisant pour que la postérité retienne ce nom tellement évocateur. C’est bien dommage, car Glenda Farrell méritait autant sinon plus que toute autre la pérennité du souvenir ému ou ébloui.
L’actrice ne s’est pas contentée de briller au cinéma mais elle a inventé un nouveau type de femme et de personnage qui n’existait pas avant elle. Celui de la « working girl » qui creuse son trou dans un milieu d’hommes et s’y fait respecter pour ses qualités professionnelles malgré ses longues jambes et ses curieux chapeaux. La femme qui travaille, galère, trempe sa chemise, réfléchit et finit toujours par gagner la partie non sans avoir ponctué toute ses phrases d’un trait sarcastique! Et bien sûr, son mâle environnement déteint un peu sur elle, elle fume, elle boit, rentre tard, joue aux courses et ose les plaisanteries risquées!
Avant Glenda Farrell ce nouveau type féminin au cinéma n’existait tout simplement pas. D’autres actrices s’engouffreront dans le créneau et c’est paradoxalement deux autres actrices qui laisseront leur empreinte dans le genre: Ruth Hussey et Eve Arden. De très grandes stars enfin viendront se frotter à ce type de rôles: Rosalind Russell, Ginger Rogers, Katharine Hepburn et même Bette Davis! Mais en son temps, Glenda était bien la reine du genre et elle était si célèbre que les scénaristes avaient beau jeu de préciser dans leurs textes « Elle entre, c’est une Glenda Farrell » Tout était dit, tout le monde avait compris!
Mais commençons par le début!
Glenda Farrell, cette folle de chats siamois est née le 30 Juin 1901 (et non 1904) à Enid en Oklahoma. Elle aura deux frères: Richard et Gene. C’est une petite fille espiègle, intelligente, débrouillarde et armée d’une volonté de fer malgré son jeune âge. C’est déjà tout son personnage en somme!
Glenda veut être actrice et elle le sera. Ses parents la « laissent faire » à condition que cette passion ne nuise pas à ses performances scolaires. C’est ainsi qu’à 7 ans elle sera déjà la petite Eva dans une version théâtrale de « La Case de l’Oncle Tom ». (Les mêmes débuts que Barbara Lamarr! N’est-ce pas un signe?) Elle jouera avec plusieurs compagnies théâtrales de passage jusqu’à ce qu’elle gagne enfin Broadway avec l’une d’elles au début des années 20.
Au milieu de la décennie elle est devenue une actrice connue et récolte de bonnes critiques. En 1928, Hollywood est avide d’actrices sachant parler puisque le cinéma en fait maintenant autant. « The jazz Singer » est sorti l’année précédente. C’est le studio First National qui lui propose un contrat après quelques essais muets et new-yorkais. Débarquée sous le soleil californien en 1928, la belle de l’Oklahoma passera chez Warner en 1930 et sera distribuée entre Edward G Robinson et Douglas Fairbanks jr. dans « Little Caesar ». Un premier rôle, un succès énorme, Glenda est lancée. Elle tournera vingt films en 1933!
Elle fait l’unanimité chez Warner à tous les nivaux « Glenda Farrell est une actrice incroyable, elle adore son métier et donne des performances inouïes même quand elle est de dos ou même hors champ! »
Résumé comme ça, le parcours de Glenda Farrell a l’air d’une promenade idyllique sur un chemin bordé de rosiers en fleurs. Or, rien n’est plus faux. En 1921, la très jeune Glenda, elle avait 17 ans, était tombée follement amoureuse d’un jeune acteur lui aussi débutant inconnu et aspirant à la gloire: Thomas Richards. Le couple s’était marié et bientôt, un petit Tommy était venu couronner leur union. Glenda était follement heureuse, mais elle se souvient qu’ils étaient alors si pauvres qu’elle découpait les langes de son petit garçon dans de vieux sacs de farine.
Les débuts furent durs. Bien trop pour Thomas Richards qui peu à peu va sombrer dans la dépression puis dans l’alcool. Glenda ne pourra rien pour l’aider. D’autant que lorsqu’il est ivre, son mari devient violent et qu’elle craint pour la sécurité de leur petit garçon. Thomas Richards ne sera jamais un acteur célèbre et travaillera à Hollywood comme monteur.
En 1937, Glenda qui est maintenant une des « first lady » de la Warner, hérite du rôle qui va faire sa légende. Celui de Torchy Blaine. Torchy Blaine, journaliste caustique sachant débiter 400 mots en 40 secondes, arrimée à sa machine à écrire, clope au bec chapeau de travers.
« Un exercice de haute volée pour moi qui ne fume pas et ne sais pas taper à la machine! » plaisante l’actrice.
Torchy Blaine va passionner le public et devenir un « serial » à succès. Jane Wyman elle-même se risquera dans le rôle lorsque Glenda y renoncera en 1940.
Hollywood et le public se sont entichés de l’actrice et de son personnage. Glenda et Torchy fascinent et font rire. Il faut dire qu’il y a de quoi. Glenda est une femme aussi intéressante que son personnage et la presse va se régaler de ses photos avec son chat siamois à lunettes. « Voir ce pauvre animal complètement miro se cogner dans tous les meubles me fendait le cœur! Maintenant avec ses lunettes il est parfaitement heureux! Je suis ravie d’avoir eu l’idée même si j’avais d’abord pensé à un casque! » Elle forme également un team à succès avec une autre star du studio: Miss Joan Blondell. Ces deux-là réunies à l’écran enchantent le public. Elles tourneront quatre films ensemble, quatre triomphes!
Mais en 1940 il va se passer plusieurs choses décisives pour Glenda Farrell. Son contrat à la Warner expire et elle se demande si elle a envie de continuer ces tournages à la chaîne dignes d’une usine à haut rendement. Elle aimerait mettre la pédale douce car comme elle le dit elle-même « Le travail au cinéma est moins gratifiant qu’au théâtre pour une actrice car vous n’avez aucun pouvoir sur le résultat final présenté au public, c’est le travail de toute une équipe ». Et logique avec elle-même, elle ne renouvela pas son contrat et regagna Broadway. Ce qui ne veut pas dire qu’elle abandonna le cinéma pour autant! On la reverra encore, épisodiquement il est vrai, 30 ans durant!
En 1941, alors qu’elle était une star immense, on la voyait à peine (mais avec Robert Taylor!) dans « Johnny Eager » Elle est un « ex » du gangster Robert Taylor qui sous son modeste chapeau de pluie lui recommande son mari dont elle est folle mais pour qui elle craint beaucoup puisqu’il est agent de police. Ironie du sort c’est lui qui dézingue le beau Johnny Eager.
Et puis Glenda avait rencontré celui qui deviendrait son second mari, le docteur Henri Ross qu’elle épouserait en 1941. Henri Ross est médecin aux armées et directement attaché au staff du général Eisenhower. Glenda retournera donc au théâtre, retrouvera Broadway et puisqu’elle est à New-York, fief absolu de la télévision elle s’y engouffre et décroche un Emmy Award en 1963 .
En 1969 elle triomphe à Broadway dans « 40 Carats » lorsqu’elle est diagnostiquée souffrant d’un cancer au poumon « Moi qui n’ai jamais fumé! C’était bien la peine! »
Elle était toujours une véritable star et follement populaire, ayant traversé les époques et les styles avec beaucoup d’efficacité et de discernement puisqu’on l’avait vue donner la réplique à Dorothy Lamour et Kim Novak avant Tippi Hedren, Elvis Presley et Jerry Lewis!
Elle tiendra son rôle dans « 40 Carats » jusqu’à ce que ses forces la trahissent. Elle doit renoncer en 1970 et s’éteint chez elle à New-York le 1 Mai 1971. Elle sera inhumée au cimetière militaire de West Point où son mari la rejoindra dans la tombe en 1991.
Tommy Garrel, le fils adoré de Glenda avait lui aussi embrassé la carrière d’acteur et même s’il ne sera jamais une grande star, il connaîtra de jolis succès personnels dans plus de 80 films. Il s’éteint en 2004 et avait donné quatre petits enfants à Glenda.
Celine Colassin
QUE VOIR?
1928: Lucky Boy: Avec Gwen Lee et George Jessel
1931: Little Caesar: Avec Edward . Robinson et Douglas Fairbanks Jr.
1932: Scandal for Sale: Avec Rose Hobart et Charles Brickford
1933: Mystery of the Wax Museum: Avec Fay Wray et Lionel Atwill
1933: Man’s Castle: Avec Loretta Young et Spencer Tracy
1933: Gambling Ship: Avec Benita Hume et Cary Grant
1933: Lady for a Day: Avec May Robson et Warren William
1934: Kansas City Princess: Avec Joan Blondell et Robert Armstrong
1934: Heat Lightning: Avec Ann Dvorak et Aline McMahon
1935: Gold Diggers of 1935: Avec Gloria Stuart et Dick Powell
1936: Snowed Under: Avec George Brent et Geneviève Tobin
1936: Here Comes Carter: Avec Ross Alexander, Anna Neagle et Iris Adrian
1936: Gold Diggers of 1937: Avec Joan Blondell
1937: You Live and Learn: Avec Claude Hulbert
1937: Hollywood Hôtel: Avec Louella Parsons, Lola et Rosemary Lane
1938: Exposed: Avec Otto Kruger
1938: Torchy Gets Her Man: Avec Barton MacLane
1939: Torchy Blane in Chinatown: Avec Barton MacLane
1939: Torchy Runs for Mayor: Avec Barton MacLane
1941: Johnny Eager: Avec Robert Taylor
1943: Klondike Kate: Avec Ann Savage et Tom Neal
1948: Lulu Belle: Avec Dorothy Lamour et Robert Montgomery
1948: Mary Lou: Avec Joan Barton et Robert Lowery
1952: Apache War Smoke: Avec Gilbert Roland
1953: Girls in the Night: Avec Joyce Holden
1954: Susan Slept Here: Avec Debbie Reynolds, Anne Francis et Dick Powell
1954: Secret of the Incas: Avec Nicole Maurey et Charlton Heston
1955: The Girl in the Red Velvet Swing: Avec Joan Collins et Ray Milland
1959: Middle of the Night: Avec Kim Novak et Fredric March
1964: Kissin Cousin’s: Avec Elvis Presley
1964: The Disorderly Ordery: Avec Jerry Lewis
1970: Tiger by the Trail: Avec Tippi Hedren et Christopher George