Le 5 Mars 1911 naît à Londres une certaine Jean Elspeth Mackenzie qui sous le nom d’Elspeth March deviendra une des grandes dames des scènes nationales.
Dès les années 30, Elspeth joue les grands premiers rôles de la compagnie théâtrale dont elle est à la fois la reine, la vedette et la tête d’affiche. Détail amusant, dans son ombre s’agitent deux jeunes comédiens, amis pour la vie, à savoir Michael Wilding et Stewart Granger qu travaille alors sous son véritable patronyme de…James Stewart ce qui va finir par poser problème.
En 1938, le couple Elspeth March-Stewart Granger convole. Ce changement de patronyme de l’acteur fait qu’une rumeur de mauvais aloi va courir dans la presse anglaise et aura la vie dure!
Elspeth joue les grandes dames depuis fort longtemps sur les scènes anglaises. Nombreux sont qui considèrent qu’elle épouse un jeune acteur aussi ambitieux qu’inconnu , sans scrupules et prêt à tout pour se faire une place en haut des affiches. Or c’est le patronyme de Stewart Granger qui est nouveau ,pas l’acteur!
Stewart Granger est en effet le cadet d’Elspeth de…deux ans! La belle affaire!
Ces mauvaises langues toujours aussi mal informée prétendront donc longtemps mais en vain que Stewart Granger se teint les tempes en gris pour se vieillir au bras de sa « vielle » épouse!
Le couple heureusement uni laisse faire et dire, préférant se consacrer à leurs carrières respectives et fonder une jolie famille. Ils auront deux enfants: leur fils Jamie et leur fille Lindsay.
A l’heure où l’Angleterre se résous à déclarer la guerre à l’Allemagne, le couple Granger sert le théâtre depuis dix ans et n’a encore jamais songé au cinéma. Seule Elspeth a surgi un soir de 1939 à la télévision.
Stewart Granger ira faire son devoir mais sera réformé au bout de deux ans et demi pour raison médicale! Elspeth a tenu crânement ses rôles dans des théâtres ébranlés dans un Londres cerclé de flammes!
Démobilisé, l’acteur va voir son destin complètement bouleversé à jamais. Il signe avec la société de production Gainsborough et devient avec son premier film » L’Homme en Gris » une superstar!
En 1945 à l’heure de la victoire et de l’armistice , il est le numéro un au box office anglais. Elspeth qui ne s’est guère révélée passionnée par le cinéma a à peine tourné, laissant la carrière de son mari prendre très largement et définitivement le pas sur la sienne.
Londres fête la victoire en admirant Stewart en technicolor, joliment mini-jupé d’orange vif dans « César et Cléopâtre » face à Vivien Leigh. Et si Vivien a les nerfs complètement ébranlés par les derniers bombardements pendant le tournage, craignant pour sa vie et accessoirement le salut de son Laurence Olivier, Déborah Kerr a les nerfs plus solides! Poursuivant Stewart Granger de ses délicates avances ils auront une liaison qui aura pour cadre essentiel la banquette arrière de la Rolls de Déborah.
Mais ce n’est pas miss Kerr qui donnera l’estocade fatale au mariage d’Elspeth et Stewart. Il règne sur les écrans londoniens une très jeune fille, 17 ans à peine, dont les sujets de sa gracieuse majesté se sont entichés: miss Jean Simmons!
Vivien Leigh décida d’épouser Laurence Olivier dès qu’elle eut vent de son existence, menant une véritable conduite obsessionnelle jusqu’à arriver à ses fins quitte à ébranler son équilibre mental à jamais. L’histoire est connue mais celle de Jean Simmons n’a rien à lui envier!
Elle décida que Stewart Granger était l’homme de sa vie et qu’elle l’épouserait! Qu’il soit déjà marié et père de deux enfants ne lui semblait pas être un obstacle qui mérite que l’on s’y intéresse même vaguement. Et que Stewart soit son aîné de 16 ans encore moins!
La rouée créature a qui on donnerait une cargaison d’hosties sans confession, voire même un double des clés du paradis, devra pour arriver à ses fins, faire la conquête du Laurence Olivier idolâtré par Vivien!
Il lui confie le rôle d’Ophélie que Vivien tenait à la scène pour le confier à Jean à l’écran. Vivien en est mortifiée, Jean devient une star! Une star nommée aux Oscars, Une star à l’égale de Stewart Granger. Les festivités peuvent commencer.
Quelque part entre 1947 et 48, Jean Simmons rencontre Stewart. En 1948, Stewart divorce d’Elspeth. En 1949 ils tournent ensemble. En 1950 ils se marient et sont prêts pour la grande aventure Hollywoodienne! Ils resteront mariés dix ans, tourneront trois films ensemble et auront une fille, Tracy.
Détail amusant, Stewart Granger commencera sa carrière hollywoodienne en étant le partenaire de…Deborah Kerr dans « Les Mines du Roi Salomon »!
Elspeth quant à elle resta à Londres et ne fit rien pour sauvegarder sa sveltesse et sa beauté. Contrairement au cinéma, au théâtre, l’âge est prometteur de plus beaux rôles encore.
Si elle deviendra au fil des années très présente à la télévision elle ne sera somme toute présente au cinéma que comme par hasard ou par accident. Elle se compromettra d’ailleurs dans quelques comédies sans grande dignité. S’il fallait retenir une des ses prestations filmées je choisirais peut-être celle du « Printemps romain de Mrs Stone » Elle est cette richissime rombière timide et ventripotente grande consommatrice de chairs jeunes et mâles faisant ses emplettes chez Lotte Lenya. Lotte entremetteuse fournissant aussi miss Stone- Leigh!
Mais rendons cette justice à Elspeth: Si elle ne fut pas une nouvelle Greta Garbo ni même une autre Agnès Moorhead, elle fut une reine des scènes de l’anglophonie mondiale jusque dans les années 80!!
Elle prendra sa retraite après plus d’un demi siècle de bons et loyaux services sur les planches.
Elspeth s’éteindra dans son Angleterre natale le 5 Avril 1999 à l’âge vénérable de 88 ans.
Le cancer des os avait eu raison de Stewart Granger qui l’avait précédée dans la tombe en 1993.
Après son divorce de 1960, Granger avait épousé une autre de ses admiratrices: la jeune miss Belgique 1959 Caroline Lecerf.
Celine Colassin
QUE VOIR?
1944: Mr Emmanuel: Avec Greta Gynt, Jean Simmons et Felix Aylmer
1949: Boys in Brown: Avec Barbara Murray et Richard Attenborough
1951: Quo Vadis: Avec Deborah Kerr et Robert Taylor
1952: His Excellency: Avec Helen Cherry et Eric Portman
1959: The Miracle: Avec Carrol Baker et Roger Moore
1960: Midnight Lace: Avec Doris Day et John Gavin
1961: The Roman Spring of Mrs Stone: Avec Vivien Leigh et Warren Beatty
1961: Follow that Man: Avec Dawn Addams
1963: Playboy of the Western World: Avec Siobhan McKenna et Gary Raymond
1964: Psyché 59: Avec Samantha Eggar, Patricia Neal et Curd Jürgens
1966: Don’t Lose your Head: Avec Joan Sims et Sidney James
1967: Sept Fois Femme: Avec Shirley MacLaine et Peter Sellers
1968: A Dandy in Aspic: Avec Mia Farrow, Laurence Harvey et Tom Courtenay
1969: Carry On Again, Doctor: Avec Joan Sims, Barbara Windsor et Sidney James
1969: Goodbye Mr Chips: Avec Petula Clark et Peter O’Toole
1969: Two Gentlemen Sharing: Avec Judy Geeson et Robin Phillips
1970: The Rise and Rise of Michael Rimmer: Avec Vanessa Howard et Peter Cook
1970: Promise at Dawn: Avec Mélina Mercouri et Didier Haudepin
1970: Twinky: Avec Susan George, Honor Blackman et Charles Bronson
1979: The Magician of Lublin: Avec Louise Fletcher, Valérie Perrine et Alan Arkin