La Brigitte Bardot italienne! Encore une!
Il suffisait semble-il de se décolorer le pompon ou plus simple encore, se chapeauter d’une perruque platinée en tirant des moues enfantines pour devenir une « nouvelle Brigitte Bardot ». Une par film…Ou presque. Certaines comme Deneuve ou Jane Fonda ont su se départir de ce titre aussi stupide que galvaudé. D’autres s’y sont prélassées avec complaisance.
Mais il n’y a qu’une Brigitte Bardot comme il n’y a qu’une Marilyn Monroe. Le reste n’est qu’ersatz ou plagiat. Parfois volontaire, parfois inventé de toutes pièces par une presse en mal de sensations blondes. Après tout, Jeanne Moreau en personne ne fut-elle pas « accusée » de vouloir remplacer Marilyn Monroe pour s’être montrée blonde dans « La baie des anges »?
Cristina vint au monde à Milan le 4 novembre 1940 dans une famille d’artistes. Son père est le peintre Adriano Gajoni. Un « cas » dans l’histoire de l’art. L’homme refuse de jouer les personnalités du monde de l’art tels Picasso ou Dali. Il tient le secret sur sa vie mieux que Garbo soi-même et ne laisse rien connaître d’autre que son travail. Il mourra en 1965 à seulement 52 ans. Cristina a 12 ans et cette disparition la laisse démunie, jeune actrice dans un cinéma en pleine révolution et sans la protection distanciée de son père.
Lorsque notre jeune héroïne fit part de sa volonté d’être actrice, il ne fut pas question de l’en empêcher mais il ne fut pas question d’amateurisme non plus. Cristina s’astreignit aux très sérieux cours du piccolo Theatro de Milan et mit son enseignement à profit pour démarrer une carrière au cinéma sur les chapeaux de roues et dans des œuvres d’une grande qualité.
Après « La tempête » d’Alberto Lattuada, elle est la jeune partenaire d’une Anne Magnani survoltée dans « L’Enfer dans la ville ». Un rôle qui vaudra à la jeune débutante le ruban d’argent décerné à la meilleure actrice de l’année dans un second rôle par la presse italienne. Difficile de faire des débuts à la fois plus prestigieux et aussi prometteurs. Sophia Loren ou Gina Lollobrigida ne pourraient pas en dire autant. Les réalisateurs qui font appel à sa jeune beauté font tous partie du haut du panier. De Lattuada à Castellani, de Castellani à Germi et de Germi à Bolognini. Une voie royale d’où Cristina s’échappe pour un rôle insignifiant dans « Guinguette » de Jean Delannoy. Une simple erreur de parcours mais à la fin des années cinquante. Dans un an ou deux, ce cinéma là n’existera plus.
Cristina est assez jolie, assez célèbre et assez talentueuse pour participer à la grande fête des coproductions internationales. Mais ces fameuses coproductions n’ont guère d’autres ambitions que de faire beaucoup d’argent avec des films de genre: Péplum, western, espionnage… Ce n’est guère dans ce créneau qui semble follement grisant vu de loin que Cristina pourra poursuivre sur sa prestigieuse lancée des années 50. La « Brigitte Bardot italienne » va tourner son content de seconds rôles dans des films sans intérêt. Grisée par la mode du postiche et de la perruque elle va se lancer dans une surenchère capillaire artificielle, semblant combattre Pamela Tiffin en duel, les deux belligérantes étant battues à plate couture par une Jayne Mansfield déjà crépusculaire égarée dans la péninsule sous la coupe du producteur Bomba.
Du péplum et du film d’espionnage, Cristina et ses perruques vont glisser dans les limbes de films d’horreur se faire mordiller par quelques vampires de seconde zone avant de dégringoler tout à fait dans la comédie vulgairement polissonne. Genre dont l’Italie se fera une brève spécialité avant que de porter le deuil de son cinéma. Mais même dans ce genre peu glorieux, Cristina n’est pas couronnée comme une reine du genre. Edwige Fenech, Barbara Bouchet ou Marisa Mell se sont installées sur le trône concerné. Pour Cristina qui avait affronté Anna Magnani, Silvana Mangano ou Guiletta Masina…
Cristina renonce à perpétrer plus longtemps une carrière décevante et se retire dès le milieu des années 70 même si on la reverra de ci, de là jusqu’en 1996. Ses apparitions ne sont plus que baroud d’honneur et petits clin d’œil au souvenir de la « Brigitte Bardot italienne ».
Celine Colassin
QUE VOIR?
1958: La tempesta: Avec Silvana Mangano et Viveca Lindfors
1959: Guinguette: Avec Zizi Jeanmaire et Jean-Claude Pascal
1959: Nella città l’inferno: Avec Anna Magnani et Guiletta Masina
1959: Un maledetto imbroglio: Avec Eleonora Rossi Drago et Claudio Gora
1961: L’assassino: Avec Micheline Presle et Marcello Mastroianni
1962: L’amour à vingt ans: Avec Jean-Pierre Léaud
1964: Agent Secret FX 18: Avec Jany Clair et Glen Clark
1964: Via Veneto: Avec Gérard Blain
1965: L’incendio di Roma: Avec Lang Jeffries
1965: Le notti della violenza: Avec Marilu Tolo et Lisa Gastoni
1965: Agente S 03: Operazione Atlantide: Avec John Ericson
1966: Furia a Marrakech: Avec Dominique Boschero et Stephen Forsyth
1966: La Battaglia dei Mods: Avec Elga Andersen
1966: El Cisco: Avec William Berger
1966: La lunga notte di Véronique: Avec Alba Rigazzi et Walter Pozzi
1967: Spia spione: Avec Lando Buzzanca
1971: Le Juge: Avec Robert Hossein et Pierre Perret
1971 : Per amore o per forza : Avec Michèle Mercier
1972: Pulp: Avec Lizabeth Scott, Nadia Cassini et Michael Caine
1973: Diario segreto da un carcere femminile: Avec Anita Strindberg
1974: Prostituzione: Avec Maria Fiore
1991: Keep on Running: Avec Michelle Phillips
1995: Camerieri: Avec Paolo Villaggio