christine pascal

Ecrire un article sur Christine Pascal est une chose qui m’est douloureuse et que je post pose depuis longtemps. Je n’ai pas eu la chance de la connaître personnellement mais j’ai tant aimé l’actrice avant d’aimer la cinéaste qu’évoquer cette femme sublime qui a choisi la mort plutôt que la vie, si belle et si jeune encore, me semble insurmontable. J’aimerais tant que ces quelques lignes ne s’achèvent pas par le grand saut dans le vide depuis une fenêtre d’hôpital psychiatrique.

Christine Pascal naît à Lyon, le 29 Novembre 1953. Elle grandira en pension chez les religieuses et gardera de ses années d’enfance un souvenir aigri.

A vingt ans elle est étudiante en lettres et étudie également l’art dramatique au conservatoire de Lyon lorsque le cinéaste Bertrand Tavernier débarque en ville pour y tourner « L’Horloger de Saint Paul ». Tous les comédiens, tous les aspirants acteurs sont en émoi. Ce n’est pas tous les jours que Lyon devient le décor d’un long métrage, même si à l’époque Bertrand Tavernier n’est pas encore le réalisateur mythique qu’il deviendra plus tard. Mais Tavernier est lui aussi Lyonnais. Après des débuts de réalisateur assez laborieux c’est la première fois qu’il peut enfin réaliser un film selon son cœur grâce à la confiance du producteur Raymond Danon avec un budget digne de ce nom et des acteurs connus: Philippe Noiret et Jean Rochefort.

Il confie le premier rôle féminin à Clotilde Joano ce qui marque aujourd’hui le film d’une certaine fatalité. Le cancer détruit déjà l’actrice. Elle a 41 ans, « L’Horloger de Saint Paul » sera son dernier film et elle ne vivra plus assez longtemps pour le voir terminé. Tavernier choisit Christine pour un court rôle et sur photo car elle ne s’est pas déplacée au casting. Parmi tous les élèves du conservatoire de Lyon elle est probablement la seule à ne pas avoir envie d’être comédienne! Elle étudie l’art dramatique comme un moyen différent d’aborder les textes et leurs auteurs, par les personnages. Mais c’est elle que Tavernier veut, pour un rôle très court. trois jours de tournage et…pas un mot à dire! Christine fit le film puis retourna à ses chères études comme on tourne la page d’un livre.

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Mais quelques mois plus tard, l’assistant de Bertrand Tavernier la recontacte. Le cinéaste l’a aimée, il a aimé travailler avec elle, il aime ce qu’il voit dans ses rushs. Il prépare un autre film, un film pour lequel il souhaite une actrice inconnue, belle, sombre, fragile: Christine.

Christine se retrouve sur le quai de la gare. direction Paris. Elle sera la jeune héroïne des « Guichets du Louvre », Une héroïne qui lui va bien, une héroïne qui va droit vers son funeste destin et qu’aucun effort ne peut sauver. Et ce, même si entretemps le film passe aux mains de Michel Mitrani. Bertrand Tavernier, pris par son horloger et par la préparation de son film suivant « La Grande Dame du Royaume » qui deviendra « Que la Fête Commence » n’a pas le temps de réaliser les « Guichets du Louvre ». Par contre, il fera de nouveau appel à Christine pour jouer face à Philippe Noiret qu’elle connaît déjà et Marina Vlady au sommet de son talent et de sa beauté. « Que la Fête Commence » sera un triomphe et Tavernier qui aime s’entourer des mêmes artistes d’un film à l’autre restera fidèle à Philippe Noiret et à Christine Pascal. Elle sera encore son héroïne pour « Des enfants gâtés » face à Michel Piccoli sur un scénario auquel mon amie Charlotte Dubreuil mit la main magistrale. Charlotte et…Christine. Après quelques jours de préparation il était apparu comme une évident que Christine devait aussi mettre sa patte sur cette histoire ou tout du moins celle de son personnage. Elle s’en donne à coeur joie. Elle met dans le personnage d’Anne beaucoup d’elle telle qu’elle est et beaucoup d’elle telle qu’elle s’aimerait. Plus exemplaire dans ses exigences. Mais le cadeau aura un revers. A l’heure de tourner le film, Christine s’ennuie prodigieusement. Elle n’a plus rien à imaginer plus rien à inventer, elle a déjà tout fait.

Son tournage suivant, « Les indiens sont encore loin » avec Isabelle Huppert l’exile à Lausanne. Elle découvre une autre ambiance de travail, une autre forme de solidarité d’équipe qui la distrait un peu de ce qui s’annonce comme une évidence: Elle n’a jamais voulu être actrice. Elle a fait du cinéma sans le vouloir sans le demander, le succès de « Que la fête commence » a fait qu’elle a continué.

Christine s’est passionnée pour le cinéma, pour tous les aspects de ce métier, très vite elle passera à l’écriture et lorsqu’elle rencontrera son futur mari le producteur zurichois Robert Boner, c’est sur le plateau d’un film où elle n’est pas actrice mais assistante de production: « Les Petites Fugues ». Ils se rencontrent en 1978 et prendront le temps de se marier en 1982, Christine Pascal deviendra alors légalement suissesse.

christine pascal

Bientôt elle se sentira assez forte pour réaliser son premier film, « Félicité ». Elle en a écrit le scénario, très autobiographique et sans la moindre complaisance envers elle-même. Elle prend aussi le risque fou de se mettre en scène et se confie le premier rôle.

Nous sommes en 1979, c’est l’échec. Son propre père refuse de voir le film, sa mère le voit, le déteste. Christine est complètement anéantie par l’échec de son film et plus encore par les critiques virulentes et assassines qui pourtant révèlent toutes une incompréhension face à l’oeuvre. Elle choisit Monique Chaumette, l’épouse de Philippe Noiret pour jouer sa mère, elle choisit Dominique Laffin pour un autre rôle important du film. Dominique que guette aussi la mort pour mettre une fin prématurée à un destin troublé. Le suicide lui aussi s’inscrit dans l’oeuvre.

Et puis ce sera la mort de Patrick Dewaere, son partenaire de « La Meilleure Façon de Marcher », un film dont ils étaient tous les deux si fiers. Son ami qui choisit lui aussi d’écourter ses jours le 16 Juillet 1982. Christine est anéantie. Des années durant elle entrera dans les églises brûler des cierges à la mémoire de Patrick. C’est la première fois que Christine Pascal perd un être proche et que ce soit par suicide la bouleverse complètement car le suicide elle y pense. Souvent. Elle en parle et ses films en parlent. Dans « Félicité » elle se donne un frère qui choisit le même chemin, et lorsqu’un jour on lui demande comment elle souhaiterait mourir elle répond « Par suicide, quand je le déciderai! »

En 1992 sonne l’heure la plus brillante de sa carrière. Christine continue son métier d’actrice et de réalisatrice mais se garde bien désormais de se mettre en scène elle-même. Son film « Le Petit Prince a dit » connaît un succès public et critique mondial, ses acteurs Richard Berry et Anémone portés aux nues pour leur performance. Christine Pascal reçoit le prix Louis Deluc et la profession est unanime: une grande est née.

Malheureusement, son film suivant, « Adultère Mode d’Emploi » n’a pas le même succès et après les cimes du « Petit Prince », Christine accuse mal le choc. Elle est à nouveau excessivement meurtrie à un point tel que son état général périclite et que son mari se contrait à l’hospitaliser à Garches dans une service neuro-psychiatrique.

Le 30 Août 1996, Christine quitte sa chambre, monte au dernier étage de l’hôpital et se jette dans le vide.

Elle avait 42 ans.

Celine Colassin

pascalchristine

QUE VOIR

1974:L’Horloger et Saint Paul: Avec Clotilde Joano, Jean Rochefort et Philippe Noiret

1974:Les Guichets du Louvre: Avec Christian Rist et Judith Magre

1974: Que la Fête Commence: Avec Marina Vlady et Philippe Noiret

1975: La Meilleure Façon de Marcher: Avec Patrick Dewaere, Patrick Bouchitey et Claude Piéplu

1977: L’Imprécateur: Avec Jean Yanne et Michel Piccoli

1977: Des enfants gâtés: Avec Michel Piccoli et Gérard Jugnot

1979: On Efface Tout: Avec Yves Beneyton, Bruno Cremer et Micheline Presle.

1979: Félicité: Avec Dominique Laffin et Monique Chaumette

1980: Le Chemin Perdu: Avec Charles Vanel, Magali Noël et Delphine Seyrig

1983: Coup de Foudre: Avec Isabelle Huppert, Miou-Miou et Jean-Pierre Bacri

1985: Train d’Enfer: Avec Gérard Klein et Roger Hanin

1987: Le Grand Chemin: Avec Anémone et Richard Bohringer

1987: Promis…Juré: Avec Roland Giraud et Hélène Duc

1990: Le Sixième Doigt: Avec Jean Carmet et Bamba Bakari

1991: Rien que des Mensonges: Avec Fanny Ardant, Baschung et Jacques Perrin

1992 (Réalisation) Le Petit Prince a Dit: Avec Anémone et Richard Berry

1994: Regarde les hommes tomber: Avec Bulle Ogier, Jean Yanne et Jean-Louis Trintignant

 

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