La belle Barbara Payton est sans doute le plus beau ratage de toute l’histoire du cinéma hollywoodien.
Née Barbara Lee Renfield dans le Minnesota le 16 Novembre 1927, Barbara grandira à Odessa (Texas) où ses parents restaurateurs se sont installés. Ils s’y installent avec leur fille et ce qui est déjà leur démon. le père et la mère de Barbara sont déjà d’énormes buveurs, ils l’étaient bien avant la naissance de Barbara.
La petite fille fut d’une beauté saisissante dès qu’elle cessa d’être un fœtus et rêva d’être une star de cinéma dès qu’elle sut que le cinéma en question existait!
Elle n’a que dix-huit ans et un culot monstre lorsqu’elle débarque à Hollywood, persuadée d’avoir fait les premiers pas vers la gloire éternelle et fabuleuse des pin-up de magazines pour GI’s selon sa légende officielle. En fait elle s’est déjà mariée avec un compagnon de collège et dès que ses parents ont réussi à faire annuler ce mariage entre deux mineurs, elle s’est remariée avec un GI’s: John Lee Payton Nous sommes en 1945, Hollywood consomme autant de jeunes starlettes pour alimenter le moral des troupes que la croix rouge n’utilise de pansements.
C’est Universal qui va l’engager et lui faire jouer les potiches savantes et bien roulées dans toute une collection de niaiseries avant qu’elle ne trouve sa chance au côté de James Cagney. L’acteur qui possède sa propre société de production est persuadé qu’il a mis la main sur une véritable perle rare et rachète le contrat de Barbara à Universal. Bien décidé à faire d’elle une star de toute première grandeur.
Dans moins d’un an Cagney s’arrachera les cheveux, maudissant le jour où il signa ce contrat maudit avec Barbara.
Quelques mois plus tard, l’actrice, fiancée de longue date au boxeur Tom Neal recyclé en mauvais acteur de série B éblouit un autre acteur: Franchot Tone qui la demande en mariage séance tenante. Devenir Miss Tone, épouse d’un acteur qui donna plusieurs fois la réplique à Jean Harlow son idole absolue et fut marié à Joan Crawford n’est pas pour déplaire à l’ambitieuse Barbara même si Franchot est maintenant un has-been des années 30 qui ne trouve pas sa place dans le cinéma des années 40.
Mais Franchot a oublié un détail: Il est depuis des années remarié avec la blonde Jean Wallace avec qui il a deux enfants. Jean est aussi blonde, aussi fantasque, aussi pétardière que Barbara et sa carrière n’est pas tellement plus brillante. Un jour qu’elle se rendait à la cuisine chercher le gâteau lors d’une fête, elle change d’avis et se poignarde avec un couteau à viande. Mais en attendant elle est bel et bine madame Tone.
La procédure en divorce du couple Tone fut formidablement croustillante. Des policiers déclarèrent avoir arrêté Jean Wallace complètement ivre au volant et ne portant qu’une petite culotte de dentelle noire sous son vision. « Quel mensonge! C’est pour me discréditer! Elle était bleue! ». Genre d’anecdotes dont la presse fait son régal. Mais le plat de résistance, c’est que Barbara est convoquée elle aussi. Dès qu’elle entre dans la salle, Jean Wallace éructe « Regardez! la voilà la salope qui couche avec mon mari! » Réponse instantanée: « Et alors? Cette pouffiasse couche avec mon fiancé! Et en plus elle m’a piqué Johnny Stompanato cette garce! »
Le divorce fut prononcé, Franchot obtint la garde des enfants et les joyeux divorcés déclarèrent: « Ouf, tout ça est derrière nous, nous pouvons partir sereins pour Paris où nous attend le tournage de notre premier film en commun. Nous sommes aux anges! »
Ils partirent en effet, tournèrent en effet et restèrent à Paris après le tournage pour une très romanesque lune de divorce qui finit en apothéose au grand bal de l’opéra.
Lorsque les divorcés rentrèrent encore tout énamourés, des étoiles parisiennes plein les yeux, Franchot retrouva Barbara séance tenante.
La bagarre qui s’en suivra presque immédiatement restera la plus célèbre de toutes: Tom Neal, éconduit publiquement agresse Franchot Tone, lui casse le nez et une pommette, l’acteur est emmené inconscient à l’hôpital où il sombre dix-huit heures dans le coma. La presse ne parle que de ça et publie à qui mieux-mieux les photos de l’objet du délit en première page: Barbara Payton est partout, son nom sur toutes les lèvres. On relaye d’heure en heure les bulletins de santé de l’infortuné Franchot et les commentaires de la belle Barbara éplorée à son chevet. Dès qu’il fut sur pieds, Barbara déclarant les yeux pleins de larmes son fol amour pour Franchot devient son épouse…Pour 7 semaines, le temps qu’il lui aura fallu pour retrouver son beau Tom…Qu’elle épouse à son tour. Un mariage qui tiendra » 4 ans, le record de Barbara. Le précédent record était facile à battre, j’en conviens.
A Broadway, les producteurs qui hésitaient entre plusieurs actrices pour incarner le personnage de Cora du « facteur sonne toujours deux fois », n’hésitent plus une seconde et tranchent en faveur de Barbara, qui, coïncidence, est née à Cloquet, petit patelin du Minnesota, lieu de naissance de Cora. Et tant qu’à rester en pays de connaissance, Barbara impose son partenaire, un certain…Tom Neal.
Le public est outré s’estime avoir été mené par le bout du nez et boycotte littéralement l’actrice, c’est clairement vers Franchot que vont toutes les sympathies à défaut de propositions de films.
Barbara Payton continuera sur la voie qui lui avait si bien réussi: celle du scandale, proclamant partout ses nouvelles amours « secrètes » dont la liste semble s’allonger de jour en jour et où l’on rencontre des noms aussi divers que Bob Hope, Gary Cooper, Frank Sinatra ou Ava Gardner! Tel les principaux concernés, le public ne réagira pas à ces révélations croustillantes si ce n’est en tournant la page.
Barbara Payton va descendre un à un les échelons de sa modeste gloire, on la saura alcoolique, souvent arrêtée pour conduite en état d’ivresse, on parlera de troubles mentaux. Bientôt sa toxicomanie n’est plus un secret
Cette femme que la police ramasse ivre, hébétée dormant dans un abribus, nue sous un manteau c’est Barbara Payton.
Cette femme qui se plaint d’une tentative de viol alors qu’elle a ramené six cow-boys ivres dans sa chambre d’hôtel, c’est Barbara Payton
La presse donnera de ses nouvelles par le biais de faits divers de plus en plus sordides : la prostituée battue, poignardée et laissée pour morte par son client dans une chambre d’hôtel sordide en 1963 n’est autre que l’actrice Barbara Payton, ex partenaire de Gregory Peck et James Cagney.
Et lorsque le playboy New-Yorkais Serge Rubinstein est retrouvé étranglé dans une chambre d’hôtel, c’est celle de Barbara Payton.
Cette femme traînée en justice pour usage de chèques falsifiés c’est Barbara Payton.
Laquelle n’hésite pas réclamer sa caution au patron du Ciro’s qui paye séance tenante, car en plus d’avouer une nymphomanie compulsive, Barbara Payton ne lésine pas sur le choix de certains moyens peu scrupuleux pour arriver à ses fins, menaçant par exemple Franchot Tone d’informer la presse de sa liaison avec « le dahlia noir » Elizabeth Short dont le meurtre en 1947 est resté non élucidé et passionne l’Amérique.
L’alcool, la drogue et la prostitution ne seront que les étapes de sa spectaculaire déchéance, lorsque ses parents retrouveront sa trace après des années de recherches, ce sera pour la recueillir clocharde dormant sur un banc.
Barbara, recueillie par sa famille boit comme une éponge et seuls son père et sa mère peuvent lui tenir la dragée haute. Et il se passe des journées entières avec les parents et leur fille abrutis d’alcool, assis dans des fauteuils, de la même pièce, sans se voir, sans se parler, sans savoir même où il sont et qui ils sont.
Barbara Payton s’éteindra chez eux en 1967, l’année de ses 40 ans qu’elle n’a pas eu le temps de fêter.
Elle avait accepté de rédiger son autobiographie « Je n’ai pas Honte » pour la somme de 1000$, manne céleste pour celle qui n’avait plus rien.
Barbara mourra avant qu’elle n’ait eu le temps d’être publiée, on y découvrira alors son mariage de cinq ans avec John Lee Payton dont elle avait un fils né en 1947.
Jean Wallace aura plus de chance. Elle trouvera l’équilibre avec son mari suivant l’acteur Cornel Wilde.
Franchot Tone, complètement démuni et ravagé par le cancer sera pris en charge par Joan Crawford et décède en 1968
Tom Neal sera condamné aux assises pour le meurtre de son épouse suivante de 20 ans sa cadette, il écopera d’une peine de 15 ans après avoir frôlé de près la chaise électrique. Il meurt en 1972 d’une crise cardiaque.
Celine Colassin
QUE VOIR?
1950: Dallas: Avec Ruth Roman et Gary Cooper
1951: Only the Valiant: Avec Gregory Peck
1955 : Murder is My Beat : Avec Paul Langton