On a souvent vu des « cover girls » ou des mannequins être repérées par des « talent scout » ou des réalisateurs et devenir des étoiles de cinéma. Qu’il s’agisse de Lauren Bacall, Brigitte Bardot, Susan Hayward, Capucine ou Suzy Parker, la liste est incroyablement longue. Mais seule Barbara Britton connut le cheminement inverse!
Barbara Brantingham naît le 26 Septembre 1919 à Long Beach en Californie. Les Brantingham ne sont pas pauvres, puisqu’à l’époque il n’y a pas de pauvres à Long Beach. Elle recevra donc une éducation strictement bourgeoise avant de signer un contrat chez Paramount en 1941.
Le studio Paramount est le studio idéal pour une actrice, car les femmes y sont bien plus respectées et mises en valeur que dans n’importe quel autre studio, sauf peut être la MGM. Mais les salaires sont nettement plus rutilants chez Paramount. Le studio fut longtemps le fief de Gloria Swanson et Pola Negri, Mae West en a été la reine. Marlène Dietrich, Carole Lombard, Paulette Goddard et Claudette Colbert en sont encore les divinités régnantes lorsque Barbara signe son contrat. Elle le signa de la manière la plus traditionnelle qui soit: Elève de l’école polytechnique, elle avait été « reine de la parade » à Long Beach et ses photos dans la presse avaient suffi pour éveiller l’intérêt du studio.
Les rêves de gloire et de notoriété les plus rutilants lui sont donc permis, mais malheureusement pour elle, chez Paramount, on fait aussi des Westerns! Un quelconque directeur de production dut lui trouver une tête parfaite pour manier le colt et la winchester, se faire kidnapper par des indiens et voyager en diligence. Barbara Britton ne devint pas « Lady Paramount », elle devint « Miss Westerns »! A elle les aventures échevelées pleines de poussière et de saloons. A elle les palpitantes scènes d’amour entre deux fusillades avec William Boyd, Joel McCrea, Rory Calhoun Randolph Scott ou…Gene Autry! Elle joua tant en robe à tournures et corsets baleinés que le jour où on publia des photos d’elle en bikini il en fut pour s’étonner qu’elle soit « si bien tournée »
Barbara tourna tant qu’elle en eut le tournis et finit par craindre pour sa santé mentale. De plus le monde était en guerre, ne pouvait-elle pas mieux défendre son pays qu’en tirant à blanc sur des figurants déguisés en apaches? Paramount lui répondit que non et Barbara Britton en eut non seulement les nerfs ébranlés, mais elle fut également rongée de honte. Qui en ces heures graves où des hommes mourraient par milliers pour sauver le monde de la domination totalitaire nazie pouvait bien s’intéresser aux aventures de Kitty Twist ou Jennifer Kendall dont on allait lyncher l’amoureux parce qu’il avait triché au poker pour obtenir la concession d’un mine d’or? Hein? je vous le demande un peu!
Barbara sollicita l’aide de psychiatres et autres médecins de l’âme, du moi, et du bien être et tomba dans la foulée, amoureuse de l’un d’eux qu’elle épousa en 1944. Le docteur Czukor de 22 ans son aîné! C’est dire si Barbara avait besoin de se sentir rassurée et protégée, elle épousait un médecin qui pouvait être son père. Cette union fut heureuse et le couple eut quatre beaux enfants, Barbara retrouva son équilibre et la félicité dans la vie conjugale.
La jeune actrice, trentenaire à la fin des années 40, continua sa carrière et se montra parfois excédée par des gens qui s’étonnaient qu’elle ait de l’esprit, de la culture et la réplique facile. Un jour qu’un énième journaleux lui disait l’air tout ébaubi « Oh mais dites-moi, vous avez oublié d’être bête! » elle lui répondit ‘Je sais qu’à Hollywood la bêtise se camoufle parfois derrière la beauté mais ce n’est pas une loi! » Sa répartie se doublait d’un franc parler assez décisif. Un jour Alberto Varga, l’illustre dessinateur de pin-up déclara qu’elle était la mieux faite de toutes les actrices, ses mensurations étant parfaites. Mise au courant, au lieu d’aimablement rougir, Barbara glapit « Qu’en sait-il? Il ne m’a jamais rencontrée! » Après cette sortie pour le moins directe, Varga et Barbara furent longtemps « en froid » à distance. « Sa remarque aussi fausse qu’elle soit ne m’a absolument pas fait plaisir, je suis une actrice et une maman, pas une estampe de calendrier! »
Elle s’engouffra à la télévision et attira l’attention de la marque de produits de beauté REVLON. Elle semblait si belle, si épanouie, si radieuse et si bien dans sa vie et dans sa peau que toutes les femmes voudraient immanquablement lui ressembler! La marque, prestigieuse entre toutes en Amérique avec Max Factor la choisit pour être sa représentante et son égérie. Elle le fut durant douze ans et continua ensuite pour le public de symboliser l’Américaine parfaite, l’épouse parfaite, la mère parfaite, bref elle était considérée à l’unanimité absolue…parfaite! Ainsi, Barbara qui avait tant craint de renvoyer une image mièvre, représentait maintenant le bonheur et la fierté d’être une femme américaine!
Le couple avait déserté Hollywood et s’était installé dans sa campagne du Connecticut. Cela éloignait Barbara des studios de cinéma, mais ça la rapprochait des plateaux de télévision où elle était très sollicitée.
Le cancer allait hélas avoir raison de cette femme heureuse et si belle encore lorsque la mort l’emporta à 60 ans tout juste, le 17 Janvier 1980. Elle s’était battue pour être une dernière fois à Noël avec ses enfants et son cher mari. Celui-ci la rejoindrait dans l’éternité neuf ans plus tard, à l’âge vénérable de 92 ans.
Questionnée sur sa carrière, Barbara réfléchit aux film qu’elle avait tournés et cherchant le meilleur d’entre eux à la demande d’un journalise répondit » I Shot Jesse James » Un western qui l’eût cru? Et qui de plus est un western de série b tourné en noir et blanc. Mais celui-là, au moins, était de Samuel Fuller.
Celine Colassin
QUE VOIR?
1941: Secret of the Wasterland: Avec William Boyd
1942: The Fleet’s in: Avec Dorothy Lamour, William Holden et Betty Hutton
1943: Freedom Comes High (Court Métrage): Avec Jaimes Craig
1943: Young and Willing: Avec Susan Hayward et William Holden
1944: The Story of Dr Wassel: Avec Laraine Day, Signe Hasso et Gary Cooper
1944: Till We Meet Again: Avec Ray Milland
1945: The Great John L: Avec Linda Darnell et Grec MacClure
1946: Le Retour de Monte Cristo: Avec Louis Hayward
1946: The Fabulous Susanne: Avec Rudy Vallée et Otto Krüger
1949: I Shot Jesse James: Avec Preston Foster
1952: Ride the Man Down: Avec Ella Raines, Rod Cameron et Brian Donlevy
1955: Ain’t Misbehavin: Avec Pipier Laurie, Mamie van Doren et Rory Calhoum