Avec la douce et gracieuse Annie Vernay c’est un des destins les plus tragiques de l’histoire du cinéma que j’évoque dans ces pages consacrées aux belles éphémères. Annie la jolie y a sa place car nulle peut-être ne fut à la fois aussi belle et aussi éphémère qu’elle.
La jolie petite Annie-Martine-Jacqueline Vermeersch naît à Genève Plainpalais le 21 Novembre 1921.
Si son père est un industriel richissime, sa mère a vu ses velléités artistiques contrariées par un mariage de raison et comme c’est bien souvent le cas, elle reportera ses ambitions déçues sur sa petite fille. Le destin va favoriser les desseins de madame Germaine Vermeersch en la laissant veuve et fortunée. Plus personne maintenant ne pourrait contrarier ses rêves de gloire et c’est elle-même qui enverra les photos de sa fille devenue une très jolie jeune demoiselle de 16 ans à un concours de beauté parisien.
Concours qu’Annie remporte haut la main.
Mais Annie n’est pas venue à Paris les mains vides: lors de ses précédentes vacances à Juan les Pins, frappé par la beauté de la jeune fille, un ami du metteur en scène très en vogue Victor Tourjansky lui a donné une lettre de recommandations pour ce dernier. Elle le rencontre donc, et lui aussi conquis lui confie d’emblée un rôle dans son prochain film « Le Mensonge de Nina Petrovna ». Annie débute à l’écran à 16 ans et connaît aussitôt un succès foudroyant propre à faire chanceler la nouvelle coqueluche de Paris de son piédestal flambant neuf: Danielle Darrieux soi-même.
Annie est une « vedette » en un film, une « jeune première » qui fait battre les cœurs et qui a eu la chance, excusez du peu, de faire des débuts entre Isa Miranda, Fernand Gravey et Gabrielle Dorziat. Elle enchaîne avec Pierre Richard Wilm, idole de l’époque et Suzy Prim dans « Tarakanova », film historique ambitieux qui se tourne dans le somptueux décor naturel qu’est Venise.
La maman d’Annie improvisée agent, coach et manager est aux anges, le film est un des plus gros succès de l’année, les photos d’Annie sont partout, son nom sur toutes les lèvres, mais la jeune fille, moins grisée que sa mère continue sagement ses études par correspondance entre deux scènes de films. Annie va enchaîner les tournages et retrouver Pierre Richard Wilm avec qui elle forme un « couple idéal » de l’écran
Mais dans cette période troublée qui précède de peu la guerre, Personne ne sait plus très bien où il en est et dans cette confusion, les films mal exploités d’Annie passent un peu au second plan de l’intérêt national, le public il est vrai a d’autres préoccupations. Forte de sa nationalité Suisse, Annie choisit de regagner son pays natal, mais parce qu’une offre venue d’Hollywood pour jouer « L’étrangère » dans « Rick’s Café » est parvenue jusqu’à elle, sa mère fléchit sa décision. Au lieu de regagner la Suisse à la neutralité rassurante et de bon aloi, mère et fille s’embarquent sur un des derniers cargos en partance pour l’Amérique.
Destination Buenos Aires puis Hollywood.
Mais la maman d’Annie Vernay qui fut toujours son ange gardien, devient son ange de la mort.
La jeune fille contacte le typhus à bord et décède à son arrivée à Buenos Aires où elle repose désormais.
Annie Vernay n’aura pas eu le temps de fêter ses 20 ans.
« Rick’s Café » changera de titre et deviendra « Casablanca », Ingrid Bergman sera « l’étrangère » après que le rôle eut été proposé à Edy Lamarr et Michèle Morgan
Germaine Vermeersch ne se consolera jamais de la mort de sa fille.
Celine Colassin
QUE VOIR?
1937: Le Mensonge de Nina Petrovna: avec Fernand Gravey
1938: Tarakanova: Avec Pierre Richard Wilm
1939: Dédé la Musique: Avec Albert Préjean
1939: Les Otages: Avec Dorville